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Vignobles Silvio Denz, partager les émotions

« Nous voulons vraiment transmettre notre émotion et le goût de nos terroirs qui sont très diversifiés. » Vincent Cruege, le directeur des vignobles Silvio Denz nous fait découvrir les châteaux Cap de Faugères, Peby Faugères et Faugères. Dégustation de ces vins millésimés 2019 avec Thierry Desseauve dans le nouvel épisode de classe de maître

Production : Jeroboam
Productrice : Juliette Desseauve
Image : Lucas Chaunay
Montage : Nicolas Guillaume
Motion Design : Maxime Baïle
Musique originale : Arthur L. Jacquin

Isabel Ferrando : « Châteauneuf-du-Pape est la quintessence de la Provence »


Retrouver le dossier L’autre Provence en intégralité  dans En Magnum #37. Vous pouvez l’acheter en kiosque, sur notre site ici, ou sur cafeyn.co.


Votre reconversion, c’était « Châteauneuf-du-Pape ou rien ». Pourquoi ?
L’appellation est à mes yeux la quintessence de la Provence. Ses vins en traduisent toutes les saveurs, la fraise écrasée, la cerise burlat, la garrigue. C’est aussi celle qui résume le mieux l’influence de la chrétienté romaine sur l’architecture provençale. Châteauneuf-du-Pape a un caractère florentin avec tout ce que cela évoque d’élégance et de douceur de vivre. De son passé de résidence d’été des papes, donc de lieu de méditation mais aussi de jouissance, perdurent un certain art du carpe diem, du farniente, et surtout la sensualité de la table autour des légumes confits, des fruits compotés et des herbes de Provence.

Vos restaurants préférés ?
L’Oustau de Baumanière est pour moi le plus bel endroit de la terre. Les propriétaires, devenus des amis, sont imprégnés de « provençalité », mise en valeur dans le jardin potager bio par Geneviève Charial. Son mari, Jean-André, qui a vinifié au château Romanin au début de sa carrière, est un grand œnophile. Plus près, à Gigondas, où j’ai commencé mon parcours de formation au domaine Raspail-Ay, je suis une inconditionnelle de L’Oustalet. Créée par la famille Perrin, l’adresse conjugue une table étoilée à l’excellent rapport qualité-prix et un bistrot qui bénéficie de la même vaste sélection de vins. Il y a aussi de très belles chambres d’hôtes.

Une brasserie ?
Le Café de France, devenu un QG de vignerons. Le chef, Christophe Bolis, y revisite avec beaucoup de finesse le répertoire français et provençal. Nous y avons goûté par exemple une bourride de lotte aux premiers légumes d’automne. Et un clos-des-papes 2013 avec une épaule d’agneau des Alpilles, confite sept heures, aux pois chiches de Caderousse.

Et un lieu du vin ?
Le caviste Chez Stéphane, où tout est inventif, la décoration chinée et l’excellente sélection de vins accompagnée de belles assiettes à grignoter, mais aussi de jolis fromages de toutes origines, son autre passion, que l’on peut aussi emporter.

Votre petite madeleine ?
La daube provençale est le plat de mon enfance, avec lequel j’ai découvert le châteauneuf-du-pape dans le verre des adultes. Aujourd’hui, je l’accompagne d’un vin du grandiose domaine Clos des Papes.

Ses adresses

L’Oustau de Baumanière (Les Baux-de-Provence)
Tél. : 04 90 54 33 07
L’Oustalet (Gigondas)
Tél. : 04 90 65 85 30
Le Vivier (L’Isle-sur-la-Sorgue)
Tél. : 04 90 38 52 80
Restaurant Sevin (Avignon)
Tél. : 04 90 86 16 50
Café de France (Caderousse)
Tél. : 04 90 51 91 81
Chez Stéphane (L’Isle-sur-la-Sorgue)
Tél. : 04 90 20 70 25

Le temps de la forêt

Dans une barrique, le vigneron élève son vin, le fait grandir. Avant, il y a l'arbre, le chêne, ses centaines d'années de pousse dans un environnement favorable. Entre les deux, la main de l'homme choisit, surveille, intervient. L’interaction permanente entre deux intelligences. Un dialogue.
La forêt de Tronçais est mondialement réputée pour la qualité de son chêne. Cette forêt très ancienne était la propriété de la couronne de France sous François Ier. En 1670, Colbert la fait cartographier et met en place un programme de semis de glands en vue d’obtenir du bois pour la marine. Elle est aujourd’hui gérée par l’Office national des forêts (ONF) qui la préserve et l’exploite respectueusement. La vie d’un chêne se planifie sur plus de deux cents ans.
L’ONF planifie la gestion des parcelles et effectue ce qu’on appelle une régénération. La parcelle, de vingt à trente hectares, est d’abord ensemencée
grâce aux glands de chênes semenciers. Un « semis » devient impénétrable au bout de dix ans. Au cours des vingt premières années,
plusieurs coupes sont effectuées afin de permettre aux plus beaux arbres de se développer. Puis la futaie est régulièrement entretenue
jusqu’à la coupe définitive des plus beaux chênes qui atteignent un âge vénérable, entre 200 et 250 ans.

 

Régulièrement, l’ONF procède à des ventes de parcelles aux enchères. Les différents exploitants évaluent alors la valeur d’une parcelle
(nombre d’arbres, taille de ceux-ci, état sanitaire, etc.) avant de participer à des enchères électroniques. Chacun inscrit le prix qu’il est prêt à payer.
Les participants découvrent ensuite qui a proposé combien et qui l’a emporté. Il faut évidemment essayer de gagner
les plus beaux lots sans compromettre l’équation économique de l’exploitation.

 

Une fois la parcelle achetée, il faut l’exploiter. L’acheteur a un à deux ans pour couper le bois sur pied.
Seulement 20 % environ d’un arbre seront conservés pour faire du bois de barriques, le reste sera vendu pour l’ameublement ou autre.
La coupe a lieu en hiver, au moment où la sève descend. Un bûcheron, qu’on appelle émondeur, grimpe dans l’arbre,
élague les branches qui le gênent, puis le tronçonne à mi-hauteur. Ensuite seulement, l’arbre est tronçonné au pied.

 

Il est essentiel de bien connaître la forêt. La famille Sylvain peut s’appuyer sur plus de trente ans d’expérience
et sa maîtrise des différents métiers (exploitant, mérandier, tonnelier). La qualité d’un bois dépend de la qualité de sa pousse.
Un sol pauvre entraîne une pousse lente qui jouera sur la qualité du grain. La connaissance intime de la forêt, de ses recoins, de ses subtilités,
est donc extrêmement importante. Comme avec le vin, la qualité de la matière première fait la différence.

 

Une fois le chêne au sol, un employé de la tonnellerie vérifie sa qualité et prend des mesures exactes.
Sur la coupe effectuée, son évaluation initiale était de 3,7 mètres cubes. Finalement, c’est 3,45. Avec ça, ils feront sept barriques.
L’arbre sera découpé en merrains qui partiront en maturation deux à trois ans (opération aussi appelée vulgairement « séchage »).
La tonnellerie les récupérera alors pour confectionner les barriques. Nous en reparlerons.

Château Kefraya, toujours plus haut

Les vendanges de 2024 au Liban, exceptionnellement précoces pour Château Kefraya, ont commencé le 6 août, une date sans précédent pour le domaine. Tous les cépages ont simultanément atteint leur maturité, ce qui a imposé une adaptation rapide pour éviter la perte de la récolte. La disponibilité de la main-d’œuvre, notamment des « badaoui » (les bédouins), a permis de répondre à cette urgence, soulignant la dépendance du secteur viticole vis-à-vis de la main-d’œuvre saisonnière.

Le fardeau géopolitique
Cette précocité s’accompagne aussi d’une pression politique accrue. En raison de l’instabilité géopolitique, les viticulteurs travaillent sans visibilité, ce qui engendre un stress constant. « Nous travaillons au jour le jour, nous ne savons pas si demain nous allons pouvoir continuer à exister », explique Fabrice Guiberteau, œnologue de Kefraya. Les affrontements entre le Hezbollah et Israël accompagnés de la peur d’une guerre régionale font stopper la consommation de vin et la visite des régions comme la Bekaa, traditionnellement fréquentée pour ses domaines viticoles. Le restaurant de Kefraya a ainsi été en partie à l’arrêt depuis janvier, et les expatriés libanais, qui généralement reviennent au pays l’été, n’ont pas répondu présent.

La crise économique
La crise économique qui frappe également le Liban est très profonde. Le marché intérieur est pratiquement à l’arrêt, tandis que les exportations, notamment vers l’Europe, les États-Unis et les pays scandinaves, deviennent vitales pour la survie du domaine. La reconnaissance et la consommation des vins libanais sur ces marchés assurent donc la pérennité de l’exploitation dans un contexte de crise économique et de guerre.

Le village de Kefraya dans la Bekaa, protégé par deux chaînes de montagne, est un paradis pour la vigne.


Le bio, un pari audacieux

En dépit de ces difficultés, Kefraya s’est lancé dans une démarche audacieuse : la conversion à l’agriculture biologique de ses 300 hectares de vignes. Fabrice Guiberteau explique que « contrairement à l’idée reçue selon laquelle une grande propriété ne peut être certifiée bio, le domaine a opté pour la certification européenne CCPB, contrôlée par un organisme italien présent au Liban. » Cette démarche de grande ampleur, première en son genre dans le pays, permet de garantir une production respectueuse de l’environnement. Cette transition vient accompagner une gestion parcellaire très minutieuse. Pour l’œnologue, « la qualité se fait à la vigne ». Le millésime 2020 est ainsi le premier à être entièrement certifié bio.

Fabrice Guiberteau (œnologue), Édouard Kosremelli (directeur général) et Émile Majdalani (directeur commercial) dans le vignoble de Kefraya. Au fond, l’Anti-Liban, chaîne de montagne qui sépare le Liban de la Syrie.

L’intra-parcellaire
L’approche parcellaire est aussi au cœur de la stratégie du domaine. Chaque cuvée est pensée en fonction de son terroir d’origine. Pour les plus prestigieuses, comme le Comte de M ou le château, seules les parcelles les plus qualitatives, situées entre 960 et 1050 mètres d’altitudes, sont utilisées. Plantées en cabernet-sauvignon (en 1995) et en syrah (dans les années 2000), elles sont identifiées pour donner des raisins de qualité, même dans des configurations climatiques difficiles. « La conversion au bio, l’utilisation de levures indigènes et l’élevage en amphore (en partie) renforcent la qualité et l’authenticité des vins de Kefraya », explique l’œnologue. Cette démarche permet aussi de répondre à une demande croissante de vins bio à l’international.

 

La dégustation de Thierry Desseauve

Château Kefraya, rouge 2019
Le nez dévoile des notes de fruits
rouges parfaitement mures.
En bouche, l’ensemble frappe
par son énergie et sa tonicité.
Le corps charnu est porté par une structure tannique fine et affirmée accompagnée d’une trame acide bien intégrée.
94/100
Comte de M. 2018
Ce comte-de-M, au nez intense de fruits rouges et noirs affiche une robe profonde, des tannins fins et une finale longue et veloutée.
95/100