Pourquoi lui
François Chidaine est un type adorable, entouré d’une bande de jeunes tous dévoués à leur patron. C’est un signe. Aussi, il fait des vins remarquables dans tous les compartiments du jeu. Des vins fins, à l’aromatique précise et subtile, l’élégance incarnée dans un verre. Le résultat d’une viticulture de…
Trente ans après l’ouverture de sa cave rue du Faubourg Saint Honoré et après s’être exporté au Japon (Tokyo & Yokohama) et au Liban (Beyrouth), Taillevent ouvre une seconde cave à Paris, rue de la Pompe, dans le très résidentiel 16e arrondissement
Ce nouvel écrin, à la fois cave et cellier, reprend les codes esthétiques (chêne, brique et fer forgé) de la cave signée Pierre-Yves Rochon. On y retrouve aussi les 2 000 références qui ont fait la renommée de Taillevent Saint Honoré et la même volonté de s’engager dans l’expérientiel. « C’est le rôle de Paul Robineau, qui nous a rejoint il y a déjà deux ans et qui est aujourd’hui le directeur exécutif de la sommellerie sur tous les établissements (caves et restaurants) » commente Thierry Gardinier, actionnaire principal, avec ses frères Laurent et Stéphane, du groupe Taillevent. « Son rôle est de piloter les sommeliers à l’intérieur des maisons et en même temps d’y créer des expériences. »
« Le but c’est d’aller au-delà de la dégustation classique » poursuit Paul Robineau. « J’aimerais que l’on fasse des événements avec des acteurs extérieurs au groupe Taillevent. Faire intervenir des MOF sur le fromage, des masters en saké ou encore M. Chapon, chocolatier, pour l’art de la dégustation des chocolats avec les vins. Je suis en contact avec la maison Dior pour faire venir un nez et expliquer les différences olfactives en le parfum et le vin. Il y a plein de choses à mettre en place. » Bref, l’expérience est au cœur du projet. Tant mieux. Si Paris ne manque pas de caves ni de restaurants, finalement assez peu de lieux sont dédiés à une expérience autour du vin.
Taillevent Victor Hugo 130 Rue de la Pompe 75116 Paris 01 83 64 31 31
Requiem in pace, le bordeaux-bashing. Et bon vent. La dernière étude communiquée par SOWINE/DYNATA 2023 nous apprend que la plupart des consommateurs français (jusqu’à 57 % des connaisseurs) préfèrent le bordeaux. Après avoir passé des années à pousser le bordeaux-bashing vers la sortie jusqu’à en faire une Une de EnMagnum, je dois bien avouer que c’est très jouissif. Je me réjouis.
Le bordeaux-bashing, c’est quoi ça ?
Mené par une petite coterie de sommeliers et de journalistes toute empêtrée dans ses idéologies et ses postures d’originalité, c’est un bel exemle de tyrannie d’une minorité. Là, c’est la mauvaise manière de dénigrer tout ensemble Bordeaux, la région, les châteaux, les propriétaires, les cépages, les pratiques culturales, les vins, le succès, les prix. Déjà, pour les prix, n’en parlons plus, la Bourgogne est loin devant, comme les grands vins italiens. Ces rebelles en chewing-gum s’indignaient de l’arrogance des propriétaires. Comprendre qu’un propriétaire de château bordelais, jusqu’à un passé récent, confiait toute sa production aux négociants de la Place de Bordeaux, n’avaient donc rien à vendre et ne se souciaient pas des visiteurs de passage. Les châteaux étaient simplement fermés, on n’avait pas encore inventé l’œno-tourisme et ses mérites.
Sowine/Dynata : le baromètre de la consommation • Ruinart Sommelier Challenge, c’est parti • Feuillatte en effervescence • Un rosé du Roussillon dans toute sa fraîcheur • Le ron ligero de Cuba • Chaque jour du nouveau, en voici cinq
Dans le vignoble
Sowine/Dynata : le baromètre de la consommation
Comme chaque année, l’agence Sowine et Dynata dévoilent leur étude sur les tendances de consommation des Français dans l’univers des vins et spiritueux. On y apprend que le vin (55 %) et la bière (56 %) sont au coude-à-coude. Si l’on ajoute le champagne (37 %), les vins repassent sur la première marche du podium. Le vin blanc est plébiscité à 93 % contre 83 % pour le rouge et 88 % pour le rosé. Chardonnay, merlot et pinot noir forment le trio de tête des cépages consommés. Bordeaux est la région préférée des consommateurs experts, amateurs et néophytes. 70 % des consommateurs boivent des vins étrangers. Et on consomme moins et mieux.
Impliquée dans la transmission des savoir-faire et dans l’accompagnement des professionnels de la sommellerie, Ruinart organise le 22 mai, à l’hôtel Cheval-Blanc Paris, l’édition de son Sommelier Challenge 2023. Au programme, champagne, variations climatiques et impact sur le chardonnay. « Créé en 2010 aux Etats-Unis et organisé aujourd’hui dans neuf pays, le programme vise à fédérer des sommeliers talentueux ayant des valeurs d’excellence et souhaitant continuer à se former aux vins et à leur élaboration » précise Florence Boubée-Legrand, œnologue de la maison, qui animera cette journée technique. « Ouvert à l’ensemble des sommeliers, l’inscription est gratuite. Les candidatures se font directement sur le site Internet de la maison jusqu’au 22 avril inclus. Les vainqueurs de chaque édition nationale participent à un séjour de formation unique de quatre jours à la découverte de la Champagne au sein de la Maison Ruinart » ajoute Frédéric Panaïotis, le chef de caves.
« EFFERV’&SENS », c’est le nouvel atelier de dégustation à l’aveugle proposé par Nicolas Feuillatte à Chouilly. Cet atelier sensoriel est un parcours pédagogique qui met en lumière toutes les étapes nécessaires à l’élaboration du champagne. « Chez Nicolas Feuillatte, on montre tout ! Le circuit visite sillonne les différents espaces où chaque étape de l’élaboration est expliquée : la cuverie spectaculaire et ses cuves de vinification, d’assemblage, puis le remuage, les caves où reposent les vins. Le visiteur est ensuite invité à s’arrêter face au vignoble, pour une présentation de la notion de terroir, ses fondamentaux et l’impact géologique de la craie et des sols argilo-calcaires sur les cépages » explique Guillaume Roffiaen, chef de caves. Devant chaque participant, douze éléments sensoriels permettront de découvrir l’univers des trois cépages phares de l’appellation. Ils sont accompagnés par une dégustation à l’aveugle de trois cuvées.
Ce domaine dispose de vignobles de 350 hectares répartis sur trois secteurs : Agly, Aspres et la côte maritime de Perpignan. Jean-Marc Lafage et son épouse Éliane, tous deux œnologues, ont investi dans une cave moderne et dans une chaîne de mise en bouteille dernier cri pour obtenir des vins précis à l’image de ce rosé Gallica 2022. 40 % de mourvèdre, 25 % de grenache noir, 25 % de syrah et complétés par 10 % de grenache gris, offrent un rosé de couleur claire, minéral, ponctué par des notes d’agrumes. Plaisir et fraîcheur sont au rendez-vous.
Domaine Lafage, Gallica 2022, 15,50 euros
Le ron ligero de Cuba
C’est au Sud-Est de l’île de Cuba que les rhums légers (Rones ligeros) sont nés en 1862 avec l’apparition de la filtration à charbon et la distillation continue en alambic vertical à colonne. Santiago de Cuba est né à la suite de la nationalisation de Bacardi et Matusalem par Fidel Castro et a pris le nom de la ville côtière où est située l’exploitation. Ce 11 ans d’âge est vieilli, comme le veut la tradition, en fûts de chêne blanc américain dans le chai Don Pancho, plus connu sous le nom de « cathédrale » du rhum cubain. Situé à proximité d’une ligne de chemin de fer, le chai tremble à chaque passage d’un train. Un rhum aromatique, tout en finesse et rondeur. À déguster seul ou en cocktail.
Pour célébrer les 70 ans de la doyenne des routes des vins de France, le Conseil interprofessionnel des vins d’Alsace (CIVA) et ses vignerons lancent l’opération Alsace Rocks La Tournée des Terroirs, un événement oenotouristique d’un nouveau genre, pour tous les publics, connaisseurs comme néophytes, à la croisée des chemins entre festival et dégustations itinérantes
« Notre constat, c’est que la richesse de sols et de terroirs en Alsace est unique au monde. Pour rendre cela plus accessible et mettre les terroirs en avant, nous avons choisi de traiter ce sujet de manière immersive. Les événements de la « Tournée des Terroirs » se dérouleront les pieds dans la vigne » explique Philippe Bouvet, directeur marketing du CIVA et créateur de l’événement. Du 23 avril au 30 juillet, chaque dimanche de 10h à 19h, cette tournée anniversaire des terroirs alsaciens sera ainsi animée par les producteurs eux-mêmes au cœur des plus beaux terroirs, ceux de 15 grands crus et lieux-dits. De Thann à Bergbieten, en passant par Kaysersberg et Dambach-la-Ville, huit étapes sont programmées dans le Haut-Rhin et sept dans le Bas-Rhin. Tout un itinéraire déployé dans un véritable paysage de carte postale et dans « un cadre naturel de dingue » selon Philippe Bouvet, entre villages fleuris aux maisons à colombages, églises romanes et gothiques, ruines de fiers châteaux médiévaux ou encore coquette caves de dégustation fraîches et accueillantes.
Immersion, pédagogie, gourmandise
A chaque étape, en lisière des ceps de riesling, gewurztraminer et autres pinots, le public retrouvera un bar à vins éphémère, des dégustations à thème et des animations culinaires, des DJ sets ainsi qu’un un espace chill et lounge. La série d’ateliers est adaptée à tous les profils : ateliers de dégustation (verticales, vieux millésimes, à l’aveugle, géo-sensorielle, différences entre les types de sols, etc.), ateliers en mouvement (sentiers découverte, ateliers zen et bien-être, promenades en segway ou vélos électriques, découverte de la faune et flore locales, travail de la vigne, etc.), et ateliers d’approfondissement (conférences et masterclass sur des thématiques plus pointues allant de la géologie à l’histoire, en passant par des regards sur la biodiversité ou les accords mets et vins, etc.). Reflétant l’engagement historique des vignerons alsaciens dans la viticulture bio et biodynamique, et dans une démarche environnementale poussée, cet événement est aussi garanti 100 % durable avec la mise en avant des mobilités douces, emploi de matériaux recyclables, mobilier issu d’initiatives de recyclage, promotion d’une consommation responsable, local et circuits courts favorisés, etc.
Départ le 23 avril de Scherwiller (67), sur le lieu-dit Rittersberg.
Arrivée le 30 juillet à Bergbieten, sur le grand cru Altenberg de Bergbieten.
Programme et informations utiles avant de prendre la route : www.latourneedesterroirs.fr
Tarif : 5 euros par adulte, avec un verre et un cordon porte-verre offerts, en plus d’un forfait dégustation pour trois vins parmi ceux des producteurs présents. Accès libre au site et aux ateliers proposés.
Engagé dans une démarche environnementale exigeante sous la bannière « Au nom de la Terre », Telmont franchit une nouvelle étape en publiant « Our Guide to Sustainability in Champagne ». Il résume son objectif ambitieux : devenir la première maison de Champagne « climate positive » dès 2030 et « net positive » en 2050.
« Le vin est bon si la terre est belle ». L’un des adages de la maison Telmont fait écho à ce que chantait déjà en 1912 Henri Lhopital, son fondateur, également musicien-compositeur. « On ne triche pas avec la terre de Champagne ». Depuis juin 2021, son projet englobe des ambitions en matière de viticulture biologique (passage au 100 % bio dès 2025 pour le domaine et en 2031 pour les vignerons partenaires), de préservation de la biodiversité, mais aussi de réduction de son empreinte environnementale avec l’abandon du fret aérien, l’arrêt total des emballages, la réduction du poids des bouteilles, l’abandon des bouteilles transparentes et des formats spéciaux, etc. « Our Guide to Sustainability in Champagne est la suite logique de ce que nous faisons depuis 18 mois » explique Ludovic du Plessis, président de la maison. « Aujourd’hui, nous voulons partager notre expérience avec toutes celles et tous ceux qui veulent entamer la même démarche et leur rendre cette tâche plus facile ».
Partager l’expérience
Avoir une contribution positive, voire super positive, pour la planète entraîne une évolution radicale des manières de cultiver, de produire et de transporter. Pour amorcer ce virage, Telmont s’est appuyée sur la méthode reconnue de la « Science-Based Targets Initiative » (SBTI). Toutes les étapes de leur démarche sont franchies en lien étroit avec le cabinet de conseil en développement durable Quantis et expliquées avec pédagogie (graphiques, tableaux et chiffres à l’appui) dans ce guide. Ce partage d’expérience explique aussi comment progresser vers le « climate positive » puis le « net positive ». Notamment comment réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre (d’au moins 90 %), mais aussi d’en retirer de l’atmosphère et de les séquestrer, principalement grâce aux arbres et à la végétation. D’ici 2030, Telmont plantera 4 900 charmes sur son domaine et incitera ses partenaires vignerons à en planter 13 800. L’usage de couverts végétaux sera systématisé sur l’ensemble des parcelles. Bref, la révolution verte de cette maison de Champagne passe par une longue liste d’actions à mettre en œuvre et des partenaires à accompagner.
Legrand, une cave au Japon • L’Hortus part en live • Le Printemps de Bourges d’Antoine de la Farge • Un rouge pour plier l’hiver • Un gin pour bien profiter du printemps • Chaque jour du nouveau, en voici cinq
Dans le vignoble
Legrand, une cave au Japon
Les Caves Legrand, célèbre cave parisienne installée rue de la Banque, ouvrent une nouvelle adresse au Japon en plein cœur de Tokyo, dans le quartier de Hirro. « Cette nouvelle vitrine incarne le savoir-faire Legrand : faire vivre des moments inoubliables autour d’une sélection pointue de références de vignerons. À l’image de l’enseigne historique, un comptoir de dégustation accueille une clientèle d’amateurs et de passionnés. Une cave offrant des cuvées d’exception et des vieux millésimes complète les lieux » précise Daisuke Maekawa, en charge du développement de la maison Legrand Filles & Fils au Japon. La cave tokyoïte proposera 500 références de vins français. « C’est un coin de France que nous proposons ».
Comme en 2022 le Rockstore, institution montpelliéraine, assurera la programmation musicale du festival. Au programme de cette cinquième édition : groove avec Wax Tailor, soul avec The Buttshakers, jazz avec De Phase, etc. Le DJ set sera assuré par Baston Creative (Sebka & Mala Fama), un studio installé à Montpellier depuis 2018. Hortus Live est un festival engagé. Il permet la mise en place d’un ensemble de mesures visant à protéger le cadre naturel et paysager ainsi que le reversement des bénéfices à des associations caritatives locales.
Le vigneron Antoine de la Farge a créé « Voilà le printemps ! » deux cuvées (en rouge et en blanc) qui seront proposées dans le cadre de l’opération « Voilà Le Printemps ! » lancée par le Printemps de Bourges Crédit Mutuel et qui se déroulera du 18 au 23 avril 2023. Proposées en édition limitée avec des étiquettes exclusives illustrées par Sylvie Bontemps, elles seront uniquement disponibles chez les meilleurs cavistes et restaurateurs de Bourges et ses environs.
Tuffeau tout flamme est la nouvelle cuvée de la cave Robert et Marcel dans la Vallée de la Loire. Un saumur-champigny bio sur des sols de tuffeau, une pierre calcaire très poreuse caractéristique de l’appellation. Ce terroir permet d’apporter de la fraicheur et de l’humidité dont la plante à besoin. Le microclimat particulièrement chaud a donné des notes d’épices relevés par des arômes de fruits confits. De la matière et du plaisir avec ce 2021.
Cave Robert et Marcel, Tuffeau tout flamme, 9,30 euros
Un gin pour bien profiter du printemps
C’est la maître distillatrice Lesley Gracie qui signe Flora Adora, la nouvelle édition de la série limitée de la distillerie Hendrick’s. Une fois n’est pas coutume, ce n’est pas dans la légendaire distillerie du Gin Palace que Lesley Gracie a puisé son inspiration, mais bien au milieu du jardin qui l’entoure, dans lequel elle a sélectionné des fleurs très appréciées des insectes amateurs de nectar. Vous pouvez le déguster en Hendrick’s Wildgarden Cup. Suivez le lien pour la recette https://www.hendricksgin.com/cocktail/hendrick-s-flora-adora-wildgarden-cup/
Suite et fin de cette volée de vins adorables, tout ceux qui m’ont enchanté ces temps-ci
Sant Armettu L’Ermite, IGP Île de Beauté 2017
Là dans le sud de l’île, le cépage qui va bien, c’est le sciacarellu. Gilles Seroin, vigneron épatant, propose avec son Ermite un vin d’une grande finesse, un vin convaincant, bien fait, très bon. Le reste de la gamme est à l’avenant. Mon préféré en Corse.
Champagne Tarlant Zéro, rosé brut nature
Benoît Tarlant a un vrai sens du champagne et, singulièrement, du rosé. Voilà une exécution de nature, ah, ah, à enchanter les amateurs de champagnes inhabituels. Pas dosé du tout (sans sucre ajouté), il a une…
Trois restaurants, trois caves de haut vol, des cuisiniers magnifiques. À la montagne, le grand vin prend de la hauteur. Nous aussi
La suite de l’article est à retrouver dans En Magnum #31. Vous pouvez l’acheter en kiosque, sur notre site ici. Ou sur cafeyn.co.
Megève
Flocons de sel
Chef trois étoiles depuis 2012, Emmanuel Renaut s’est installé en Haute-Savoie dès 1997. Il incarne une cuisine en fusion avec la montagne.
« J’aime boire. Attention, je ne suis pas alcoolique, mais j’aime les bonnes choses. J’ai un frère aîné qui était sommelier au milieu des années 1980. J’ai eu la chance, quand j‘étais jeune commis, de voir tous les sommeliers importants défiler à la maison et de goûter des choses assez exceptionnelles. Tous les jeudis quand je pouvais, j’allais à la dégustation de l’Association des sommeliers de Paris. J’ai eu la chance d’aller voir la finale du meilleur sommelier du monde qui avait eu lieu au Cirque d’hiver et consacré Serge Dubs, en 1989. J’ai eu la chance d’être en contact avec ces sommeliers que ce soit, Dubs ou Poussier (meilleur sommelier du monde en 2000) avant qu’ils soient connus internationalement. La chance d’avoir été avec ces gens-là a permis une transmission qui a marqué mon rapport au vin. Il n’y a pas un bon repas sans un bon vin. »
L’accord parfait « Quand je vais au restaurant je suis plutôt rouge. Chez un de mes amis, il y avait un sommelier qui ne vendait que du blanc. À chaque fois, je m’énervais et je lui disais : « Je choisis le vin et ne vos préoccupez pas d’avoir un accord parfait ». Ils sont tellement focus sur leur passion à eux qu’ils ne voient pas le plaisir du client. Si le client a envie de boire une bière avec son foie gras et bien, c’est comme ça ! »
Les vins de montagne « Michel Grisard (NDLR, un vigneron emblématique à l’origine de la renommée des vins de Savoie), c’est un copain. Je le connais depuis 1989 ou 1990, c’est quelqu’un d’extraordinaire et un précurseur dans sa façon de travailler. À l’époque, il était perçu comme quelqu’un de différent. Tout le monde le prenait pour un barjot avec ses coccinelles. Et maintenant, tout le monde fait ce qu’il faisait il y plus de trente ans au niveau du respect de l’environnement et du terroir. Ce qui est extraordinaire avec les vins de Savoie, c’est que l’on a des cépages endémiques avec des caractéristiques très personnelles. C’est ce que j’aime dans les vins de montagne, qui deviennent d’ailleurs tendance. Entre l’évolution climatique et la qualité de ce que font les vignerons maintenant et ce qu’il se faisait il y a trente ans, c’est le jour et la nuit. On a une multitude de jeunes qui font des vins justes exceptionnels dans le respect de la nature. »
L’accord signature « Je suis un buveur de vins rouges, mais il y a un cépage que j’adore, c’est la petite arvine pour son côté salin avec des amers qui donnent envie de boire et de manger. Il y a quelque chose de régressif, c’est gourmand. C’est comme pour l’assiette. Ce que j’aime quand on l’a finie, c’est d’en reprendre un peu. Une bonne bouteille pour moi, c’est pareil. Quand on a encore envie d’en boire un petit verre quand on l’a finie. Une petite arvine sur un biscuit de brochet par exemple. Je trouve que ce cépage correspond bien à ma cuisine ».
Emmanuel Renaut a publié cet hiver Vignerons Alpins dans lequel il leur rend hommage des trois côtés de la frontière (Savoie, Valais et Val d’Aoste). 75 euros.
Preuve que l’entêtement de civilisation propre à nos chers vignerons n’est pas l’apanage des Français, c’est une Colombienne qui crée avec succès cette nouvelle marque en Champagne. Hathyr, un drôle de nom pour un grand vin. Par Marie-Charlotte Wambergue photos Mathieu garçon
Cet article est paru dans En Magnum #30. Vous pouvez l’acheter sur notre site ici. Ou sur cafeyn.co.
Monica Marini et sa famille décident de s’installer en France alors qu’elle n’a que 18 ans tout juste. Ils arrivent de Colombie, Monica ne parle pas un mot de français et s’inscrit en langues à la Sorbonne, avant de s’orienter vers le droit. L’oncle par alliance qui les accueille dirige une belle société française et aime, à ses moments libres, découvrir les savoir-faire hexagonaux. Il sera le guide de Monica et l’initiera à la gastronomie et aux vins, ses univers favoris. Pour elle qui vient d’un pays dont ce n’est absolument pas la culture, la rencontre est foudroyante.
La passion est née. Elle lâche le droit et s’inscrit aux cours d’œnologie et de viticulture à Avize. Mais alors qu’ils réfléchissent à un projet en Champagne, son oncle décède. Qu’à cela ne tienne, mue par sa passion, elle se lance seule, et décide de créer sa propre marque avec ses tous petits moyens. Mais comment faire quand on est colombienne et sans moyens financiers ? Elle arpente les grands vignobles champenois que sont la côte des Blancs et la montagne de Reims. Inaccessibles. Ses pas la mènent alors vers la vallée de la Marne.
À Charly-sur-Marne, plus précisément. L’entrée ou la sortie de l’appellation, c’est selon. Un endroit où l’on ne vient pas pour faire de l’œnotourisme. Cest bien dommage, la campagne et les terroirs sont beaux. Le paysage propose de multiples orientations et altitudes et des morcellements en cirque. Essentiellement plantés en meunier, qui a aujourd’hui gagné ses lettres de noblesse, ses sols sont bien plus variés que ceux des vignobles classiques autour de Reims. Autrefois, le cœur du Bassin parisien, ce terroir a bénéficié d’une déposition marine très importante dont les couches successives et la micro-géologie font la différence dans les assemblages.
Monica a tapé dans le mille, en témoignent les grandes maisons de champagne qui recherchent aujourd’hui cette typicité. Sa rencontre avec la troisième génération d’une famille de vignerons implantés depuis les années 1940 dans cette partie de l’Aisne sera décisive. Lise, Aline et Claire accueillent avec intérêt Monica et acceptent qu’elle participe activement à toute la vie de leur vignoble. Monica est conquise par leur ouverture d’esprit et elles, par son âme de vigneronne. Hathyr voit le jour en 2014. Pourquoi ce nom ? En règle générale, les champagnes portent un nom de famille. Monica a préféré un choix plus personnel. Elle a toujours été attirée par la mythologie, égyptienne et grecque. Athyr y représente la déesse de l’amour et de la fête, donc tout ce qui inspire ce breuvage finement pétillant.
Quant au H supplémentaire, il indique le mois de septembre dans le calendrier égyptien. Un mois essentiel dans la vie du vigneron que ce temps des vendanges. Cette signature devient une réalité. Et elle ne s’accompagne pas des reproches que l’on entend parfois à propos des marques d’acheteur. Monica a une philosophie, partagée par ses partenaires. Elle produit des vins de qualité destinés à la gastronomie. Le vignoble est certifié Haute valeur environnementale et Viticulture durable en Champagne depuis 2016. Des 52 hectares, dont plus de la moitié à Charly, elle sélectionne les raisins qu’elle veut pour elle. Le vignoble est majoritairement planté en meunier, puis en chardonnay, qui révèlent une grande richesse et assurent ainsi la membrane de transparence et de pureté de ses vins. Le reste en pinot noir.
Les cuvées sont pressurées par secteurs, un travail artisanal. Monica a la chance de pouvoir choisir ses vins, ses assemblages, ses dosages, ses millésimes. Et teste le passage en fûts de chêne de ses chardonnays. Elle peut aussi travailler sur des bases qui ont au moins quatre ans. Ses quatre cuvées, brut sans année, blanc de blancs, rosé et millésimé, présentent un vrai style gustatif. L’homme qui partage son quotidien y est peut-être aussi pour quelque chose – bien qu’il soit arrivé au cours de l’aventure – puisqu’il s’appelle Philippe Jamesse, fameux sommelier des Crayères, créateur de verres et auteur dont la réputation n’est plus à faire. L’avenir d’Hathyr ? Continuer à avancer prudemment. Viser les beaux endroits de la gastronomie, il est déjà sur les tables d’Anne-Sophie Pic. Développer l’étranger en dehors du Japon, qui l’a déjà adopté. Et toujours porter haut l’appellation, c’est bien engagé.
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