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Avec sa Cité des Climats, Beaune célèbre ses vins et ses terroirs

La Cité des climats et vins de Bourgogne a ouvert ses portes le 17 juin dernier. Un site qui s’inscrit dans la dynamique du classement des Climats à l’Unesco, obtenu en 2015

Beaune capitale des vins de terroirs ? Il manquait un lieu pour l’incarner. C’est chose faite depuis quelques jours. Le bâtiment : 3 600 m2 orné d’une vrille, rappelant celle de la vigne, qui s’élève à 21 mètres de haut. Le tout couronné d’une terrasse panoramique offrant une vue sur la côte viticole. L’objectif : « Présenter la Bourgogne comme la dépositrice du modèle des vins de terroirs par rapport à d’autres grands modèles comme Bordeaux et ses châteaux, la Champagne et ses marques, etc. », expose Benoit de Charrette, président de la Cité des climats et vins de Bourgogne.
Le projet, imaginé il y a dix ans déjà, s’inscrit dans la dynamique du classement des Climats à l’Unesco, obtenu en 2015. Le maire de Beaune, Alain Suguenot, et le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB) s’entendaient alors sur la nécessité de créer un « vaisseau amiral » pour la communication régionale. Le BIVB précisait ainsi ses ambitions : « Il faut que les visiteurs venant en Bourgogne puissent trouver un point d’entrée par lequel ils pourront ensuite essaimer », exposait Pierre-Henry Gagey, président du BIVB, en juillet 2013.

Une mère et deux filles
La Cité des Climats a donc donné naissance à deux « filles ». L’une à Mâcon, l’autre à Chablis. Deux sites plus modestes mais à l’unisson de Beaune. « On pourra y découvrir la totalité de la Bourgogne mais avec un approfondissement sur les vignobles du Mâconnais ou de l’Yonne. Le parcours et la muséographie ne seront pas les mêmes. Ils ont été pensés pour qu’il n’y ait pas de redondance », précise Benoit de Charette.
À Beaune, le parcours d’un peu plus d’une heure amènera les visiteurs à se pencher sur tout ce qui fait les spécificités du vignoble bourguignon : géologie, histoire, millésime, etc. Il doit aussi permettre de comprendre le travail de la vigne et de mieux connaitre les hommes qui ont mis en valeur ces terroirs. Le prix d’entrée, fixé à 14 euros (9 euros à Mâcon et Chablis), donne également accès à la dégustation de deux vins. Le site de Beaune sera par ailleurs le nouveau siège de l’École des Vins de Bourgogne. Cette dernière proposera des ateliers dégustation thématiques pour les amateurs désireux d’aller plus loin.
Le pari est d’atteindre 150 000 visiteurs par an pour équilibrer les comptes. « Des centaines de milliers de visiteurs viennent en Bourgogne pour les vins, rencontrer les producteurs, les comprendre… Jusqu’à présent, il n’existait pas de lieu qui puisse leur permettre d’avoir une introduction nécessaire à une compréhension générale du vignoble. C’est ce qui nous permet d’être très confiant. Je pense que l’on s’est fixé des objectifs assez modestes par rapport au visitorat lié aux vins en Bourgogne », précise Laurent Delaunay, président du BIVB. Les premiers chiffres ne manqueront pas d’être scrutés avec attention.

Bordeaux et Beyrouth, épaule contre épaule

L’entrée de Jbeil, au Nord de Beyrouth, premier port Phénicien, d’où partait déjà le vin, il y a quatre mille ans.

Les liens entre la France et le Liban sont historiques. Il n’y avait pas de raison que la situation soit différente entre ses vignobles. Comme souvent, Bordeaux montre la voie de la fraternité


Cet article est paru dans En Magnum #32. Vous pouvez l’acheter en kiosque, sur notre site ici. Ou sur cafeyn.co.



« Avec Bordeaux, par Bordeaux, pour Bordeaux »,
ces mots étaient au centre de la rencontre organisée au mois d’avril au Liban par la commanderie de Bordeaux à Beyrouth. Venus de Paris, Bordeaux, Stockholm, Atlanta, Dallas ou encore Philadelphie pour promouvoir les vins de Gironde et découvrir la culture du pays hôte, vingt-huit membres de commanderies de Bordeaux à travers le monde ont répondu présent.
L’idée de cette réunion a germé en septembre dernier durant le congrès mondial des commanderies. Cet événement, organisé tous les quatre ans par le grand conseil du vin de Bordeaux, réunit environ quatre cents personnes (en tout, il y a quatre mille commandeurs dans le monde). Évidemment, différentes visites de châteaux sont au programme. « Un soir, nous étions au château Siran à Margaux et j’ai aperçu nos amis libanais en grande conversation », raconte Hubert de Boüard, grand maître du grand conseil du vin de Bordeaux. « Ils étaient en train de programmer une visite dans leur pays. Une vraie première. » Maître de la Commanderie à Beyrouth, Étienne Debbané confirme : « Plusieurs commanderies ont exprimé le désir de venir au Liban. Nous leur avons écrit et avons fixé une date. Nous sommes heureux d’avoir pu les accueillir. C’est une grande réussite et une preuve de dynamisme ».

La cérémonie d’intronisation de quatre nouveaux membres à Ixsir.

La Commanderie à Beyrouth
Créée en 2015 à l’initiative d’Étienne Debbané et d’Hubert de Boüard, la commanderie de Bordeaux au Liban regroupe trente-six membres, dont quatre ont été intronisés à cette occasion (Véronique Hraoui, Leyla Nassar, Wajdi Diab et Michel Gédéon) lors d’une cérémonie qui s’est déroulée à Ixsir, le domaine viticole installé sur les hauteurs de Batroun co-fondé par Étienne Debbané. Désormais commandeur, Michel Gédéon a raconté sa rencontre avec le vin : « Je suis né en 1992. Après avoir fini mes études secondaires à Beyrouth, j’ai rejoint l’université américaine de Paris pour suivre des études de commerce. C’est là que j’ai découvert ce qui, depuis, est devenu une passion ». Véronique Hraoui a quant à elle évoqué la joie de rentrer dans un cercle d’amis amoureux des vins de Bordeaux et l’importance de pouvoir bénéficier d’une ouverture vers l’extérieur : « C’est aussi un message d’espoir pour le Liban qui a toujours eu la vocation de s’ouvrir sur le monde. Là, c’est par le biais du vin, avec le plaisir en plus ».

Les vingt-huit membres de commanderies de Bordeaux visitent le site romain de Baalbek, dans la plaine
de la Bekaa, où se trouve le temple de Bacchus.

La culture de l’accueil
Les Libanais sont amateurs de bons vins en général et de bordeaux en particulier. « Quand on parle de vin au Liban, on évoque immédiatement la France. Quand on dit vin français, on cite Bordeaux en premier », explique Étienne Debbané. « Les Libanais ont forgé leur goût pour le vin avec Bordeaux. Ils sont douze millions à vivre en dehors du pays et sont de grands ambassadeurs. Le Liban a aussi une grande histoire viticole. » Ce rassemblement ne pouvait donc passer à côté de la culture locale du vin et du sens de l’accueil, de la convivialité et de la générosité des Libanais, notamment exprimé par ces familles qui ont su rebâtir sur les ruines de maisons détruites pendant la guerre, telle celles de Philippe Jabre (Bois-de-Boulogne) et de Farid Abdelnour, à Bhamdoun. Au programme, route du vin et visite du temple de Bacchus à Baalbeck, caves historiques du château Ksara, détour par l’emblématique château Musar et visite d’Ixsir, domaine construit de toute pièce en 2008 dont le chai enterré a été distingué par la chaîne de télévision CNN comme l’un des bâtiments les plus écologiques au monde. Les membres de la commanderie ont aussi pu marcher sur les traces des Phéniciens et des Ottomans en visitant la ville de Byblos dans le nord et de Saïda, au sud.

Hubert de Boüard, grand maître du grand conseil du vin de Bordeaux et Étienne Debbané, maître de la Commanderie à Beyrouth.

Une question de valeurs
Les Libanais puisent leurs forces dans ce glorieux passé pour construire leur avenir, d’autant plus que cet avenir est principalement porté par les initiatives privées des femmes et des hommes qui ont choisi de rester pour donner une chance aux générations futures. Ainsi d’Étienne Debbané, dont la famille a été chassée de sa maison entre 1975 et 1991 : « Je suis né à Saïda, nos racines sont ici et nous sommes fiers de transmettre ce patrimoine ». Si nul ne songe à nier les difficultés financières et politiques de ce pays en crise, cette situation n’empêche pas les gens de vivre, de construire, de faire du vin. Et de progresser en la matière. « Je suis venu au Liban pour la première fois il y a vingt-cinq ans. Les Libanais n’étaient pas très fiers de leurs vins », se souvient Hubert de Boüard. « Ils ont demandé conseil, mis les moyens et ont appris à connaître leurs terroirs, la climatologie du pays et l’adaptation de cépages. Ils sont désormais fiers de ce qu’ils peuvent offrir au monde. L’amour du vin au Liban s’exprime avec les vins de Bordeaux, mais aussi, petit à petit, avec les vins libanais. »

Le passé et l’avenir
La culture viticole du pays du Cèdre remonterait au VIIe siècle avant notre ère, au temps des Phéniciens, ancêtres des Libanais. Ces derniers étaient présents sur un territoire qui correspond en grande partie au Liban actuel. Des fouilles archéologiques entreprises dans le Sud-Liban sur le site de Tell el-Burak, à environ huit kilomètres de la grande ville côtière de Sidon, ont confirmé cette hypothèse phénicienne. Elles ont même apporté une nouvelle certitude, celle de la fabrication du vin par les Phéniciens eux-mêmes, grâce à la mise au jour d’un pressoir vieux de 2 600 ans (voir l’article « Vins du Liban, gloire et brouillard », En Magnum #21).
L’Empire ottoman a anéanti ce savoir-faire qui fut réintroduit par les Jésuites au XIXe siècle. Dès 1857, les moines installés dans la plaine de la Bekaa cultivent et produisent un vin destiné à leur consommation personnelle. Une grotte naturelle est découverte, puis agrandie pour atteindre une longueur de deux kilomètres. Elle appartient désormais au château Ksara. Aujourd’hui, le Liban compte environ cinquante producteurs de vin. Parmi eux, Kefraya, Ksara, Musar et Ixsir sont les ambassadeurs des vins libanais à travers le monde.

 

Portugal : les couleurs du pays bleu


Cet article est paru dans En Magnum #31. Vous pouvez l’acheter sur notre site ici. Ou sur cafeyn.co.


L’histoire se passe entre deux palaces de Curia, au centre du Portugal. Je quitte l’un, où nous logeons, pour rejoindre l’autre, situé à quelques centaines de mètres. Des copains m’ont proposé de boire une bière au bar après une journée de dégustation au concours mondial de Bruxelles. Jusque-là, que du classique. À 22 h 30, il fait frais, comme toutes les nuits dans cette région viticole située à quelques kilomètres de l’océan. Arrivée dans le superbe hall du Curia Palace, l’une des étapes du groupe hôtelier Almeida, je tombe sur d’autres membres du jury que je ne connais pas encore. Peter d’Afrique du Sud, Lisse de Londres et Liam d’Irlande m’invitent à me joindre à eux. Peter a appelé son pote, António Rocha. Même en ces heures tardives, il a accepté de nous ouvrir sa cave. Vingt-cinq ans qu’il fait les vins de la famille Almeida et qu’il veille sur les bouteilles à Curia comme à Bussaco, dans le Dão, la région voisine. Créée pour honorer les clients de ces deux palaces, la cave contient des vins juste à point, vieillis le temps qu’il faut et servis le jour J de leur apogée. Le jeu en vaut la chandelle. La bière au bar (fermé, en fait) s’éloigne et l’expérience unique se rapproche. Lisse, grande blonde d’un inépuisable enthousiasme, est tout excitée et me dit que les Anglais qualifient ce genre de situation de serendipitous.

Le Curia Palace, à Curia, appartient à la famille Almeida. Son atmosphère Belle Époque permet de s’échapper quelques jours dans l’espace et dans le temps. La cave gérée par António Rochas regorge de trésors du Bairrada et du Dão voisin.

En dentelle
António nous montre les coulisses de cet hôtel Belle époque encore dans son jus (cabine téléphonique, relais de poste, etc.) et nous invite à le suivre, dehors, dans la nuit. Il ouvre une vieille porte en bois et dévoile son antre. Des murs de bouteilles couchées sans étiquette. Il nous mène à travers les millésimes, nous tend les flacons comme des trophées. Les millésimes 1967, 1956 ou encore 1922 dorment bien ordonnés derrière l’hôtel, dans un espace climatisé. António est chez lui. Il tient à nous montrer le lieu des réjouissances. On sort à nouveau dans le noir pour faire le tour du vieux bâtiment aux murs de chaux. La mini cuverie apparaît encore plus belle dans l’imprévu. Des lagares de ciment et de granit, quelques fûts français (de chez Sylvain), quelques cuves inox pimpantes, des bouteilles de bulles couchées dans un box-palette. « Un essai », explique le maître de chai. De quoi faire 20 000 bouteilles par an, pas plus, tout confondu. Nous retournons aux vieilles bouteilles. Notre hôte surprise – thank you Peter – décide d’attraper une quille de 1983. « Parce que j’aime bien ce millésime », dit-il simplement. Du rouge, cépage baga en majorité. Il ajoute : « Si elle n’est pas bonne, j’en ouvrirai une autre ». Il connaît chaque bouteille par cœur, ne se trompe jamais. Il pose l’heureuse élue sur une toute petite table en bois d’un autre siècle. Nous l’admirons.

Pour faire les choses jusqu’au bout, il appose une étiquette délicieusement dessinée, un peu de travers. C’est le contenu qui compte. Il ôte le bouchon, délicatement. Il a l’habitude. Il fait lui-même le reconditionnement de toutes ses ouailles, nous montre ses outils de bricoleur. La bonbonne d’azote, les pinces et même de fines couches de bébé en coton pour nettoyer ses goulots. Il récupère cinq verres, amples et ronds, « à bourgogne », rincés dans l’évier. La couleur est tuilée comme celle d’un vieux pinot noir. Le nez, ah le nez, Lisse manque de tomber dans les pommes. Le vin explose, parle franchement de son histoire. Framboise, épices, pointe de rose. Pour moi, c’est la bouche. Loin de m’effondrer, je m’envole, je plane, nous planons. Dentelle de petits fruits délicats, longueur inouïe, finesse redoutable avec cette touche saline qui signe les grands vins. Un léger dépôt nous fait de l’œil. Nous échangeons nos regards, les yeux humides. Le vin se met à nu, avec douceur, attention, respect et humilité. Bienvenue au pays du baga. Minuit largement passé, nous laissons António rejoindre son oreiller. Ce n’est pas le seul à nous dévoiler la grandeur des vins issus des cépages portugais. La plus vieille cave de la région, São João, nous a ouvert un 1995, élégant, magnifique de souplesse en milieu de bouche. Presque trente ans pour en arriver là.

Le baga est le cépage roi du Bairrada.Vinifié en rouge, il s’épanouit sur de l’argilo-calcaire bien visible ici.

L’argile et l’océan
Comme l’Italie, le pays regorge de cépages autochtones capables d’offrir des sensations nouvelles et originales. Il en existerait 350 ici. D’autres minimisent, ce serait plutôt 200, répartis du nord au sud. Pourquoi seraient-ils originaires de cette région plutôt que d’une autre ? Pas toujours facile de le savoir. Ce qui est sûr, c’est qu’ici, dans le Bairrada (qui signifie terre d’argile), le baga est roi. Dans les vieilles parcelles, il est complanté. Il partage sa notoriété avec le touriga nacional et le tinta roriz ou aragonez (le tempranillo) et, en blanc, le bical, le maria gomes qui s’appelle aussi fernão pires, l’arinto et le cercial. L’appellation Bairrada est née en 1979. Elle fait partie de la dénomination régionale Beira Atlântico et couvre 8 129 hectares (source : commission viticole du Bairrada, 2021) répartis dans les mains de petits propriétaires terriens qui vendent leurs raisins et d’une quarantaine de producteurs actifs. Le chiffre est à prendre avec des pincettes car les vignes abandonnées sont pléthore. Les viticulteurs vieillissent et la relève manque, comme dans de nombreux vignobles européens. Les raisins prospèrent, bénéficiant des amplitudes thermiques entre le jour et la nuit.

Le domaine de Carlos Campolargo, à Anadia. La cave fut construite en 2004. Juste devant, on distingue plusieurs hectares de baga et touriga nacional qui vont être arrachés pour planter du pinot noir.

Début juillet, au moment de notre reportage, les nuits sont bien fraîches. Les journées sont chaudes, mais pas trop. L’océan n’est pas loin et provoque une brume matinale, même en plein juillet, dont la fraîcheur est bienvenue. Il apporte des pluies, aussi, qui fragilisent les raisins et entraînent des poussées de mildiou et d’oïdium. On ne peut pas tout avoir. Le baga est, de la même manière, la force et la faiblesse de la région. Il est sensible aux maladies, mûrit tardivement, craint les pluies d’équinoxe. On le dit rustique dans sa jeunesse, tannique et acide. C’est peut-être pour cela qu’à la fin du XIXe siècle, l’idée est venue, appuyée par quelques Champenois, de le ramasser plus tôt pour éviter les risques et le transformer en bulles. D’où sa force ainsi découverte, son côté magique. En 1887, à la fin de sa vie, le professeur António Augusto de Aguiar fonde l’École pratique de viticulture. Le premier exercice y fut l’élaboration d’un vin mousseux. Ainsi, le vignoble de Bairrada est devenu leader des espumante. Les méthodes traditionnelles représentent aujourd’hui 53 % de la production nationale de bulles. Quelle bonne idée. Le vin s’est taillé une réputation grâce à l’association avec le leitão, spécialité culinaire locale, un cochon de lait cueilli au berceau – plus il est jeune, plus il est tendre. L’espumante est son compagnon de table. Tous les Portugais le savent. Qu’ils traversent la région entre deux réunions à Lisbonne et Porto, qu’ils viennent se dorer sur les plages et profiter de quelques jours de vacances, ils font une pause obligée pour déguster sur place la chair de ce cochon, fondante et recouverte d’une pellicule croquante. La peau croustille. La conversation va bon train. Le vin me parle, pas en portugais mais en attaque soyeuse et délicate. Tout est fin, même le gras. Les bulles, salées et acides, le contrebalancent et le rendent digeste. Des tranchettes d’orange accompagnent le supplice. C’est redoutable.

Monsieur baga
Le baga s’impose comme le cépage roi, versatile à souhait comme le chenin ou encore mieux, car il est noir, le pinot. Il enfante ses mousseux tôt en saison, des blancs de noirs, des rosés et des rouges (toujours mousseux). Ramassé trois semaines plus tard, il est parfait pour de grands rouges tranquilles, de garde. Du coup, dans une même vigne, Luis Pato procède à plusieurs tries, comme on le fait pour les liquoreux. Luis Pato, c’est « Monsieur Baga ». Quarante-deux ans de carrière à se battre pour les cépages locaux, à coup d’expérimentations en tout genre. Il est né dans une famille notable de vignerons. Son grand-oncle Mario Pato fut le premier œnologue à enseigner la vinification au Portugal. Son père João est le premier à mettre en bouteille dans les années 1970. Luis a révolutionné la région à son tour. En 1985, il égrappe le baga, le fait vieillir en fûts français. Au début des années 1990, il fait craquer Jancis Robinson avec ses monocépages, puis Robert Parker avec sa cuvée Pé Franco, un vin issu de vignes non greffées plantées dans les terres sablonneuses. Il s’ouvre des portes, les bonnes. Toujours à la même époque, il est juge à l’International Wine Challenge en compagnie des critiques britanniques à la dent dure. Il a accès aux vins du monde entier et peut comparer ses bébés aux autres pointures. L’insatiable Géo Trouvetou, chimiste de formation, n’aura de cesse de bousculer les codes, de pousser le baga jusque dans ses retranchements. Il sort de l’appellation, comme les grands de Toscane, préfère la liberté de la plus large dénomination Beiras. Trente ans plus tard, toujours aussi inventif et enthousiaste, il connaît parfaitement ses terroirs, ses climats, ses raisins et s’est rôdé aux forces du marché. Il cultive son image comme un chef, tire la langue face à l’objectif, Einstein de la viticulture. Clin d’œil british, il use et abuse sur ses étiquettes du pato (canard) sous toutes ses formes. éternel rebel, son autre surnom qu’il affiche sur son t-shirt, il pétille d’idées et de dérision tout en nous montrant une quantité incroyable de vins issus aussi de bical, de maria gomes, de cercial et de son protégé, le sercialinho.

Soupe de fraises
Il a entraîné bien du monde dans son sillon. Ses filles ont toutes (ou presque) été contaminées par sa passion. Luisa, 43 ans, João, 40 ans, qui fait des pet’nat et des vins nature sous la marque Duckwine, et Filipa qui a lancé son propre projet en 2001 à Quinta do Riberinho avec le sommelier et restaurateur belge d’Anvers, William Wouters, épousé en 2008. Avec sa force de caractère, elle a préféré créer sa propre cave, pas trop loin de papa quand même. En biodynamie. Même histoire, même profil que le tout aussi charismatique Emidio Pepe dans les Abruzzes italiennes et ses trois filles dont l’une, Stefania, s’est éloignée pour embrasser la biodynamie (cf. En Magnum n°26). Luis a aussi fondé les « Baga Friends » qui, comme le nom l’indique, défendent corps et âme le cépage noir : António Rocha (Buçaco Wines), Dirk Niepoort (Niepoort), François Chasans (Quinta da Vacariça), Mário Sérgio Nuno (Quinta das Bágeiras), Paulo Sousa (Sidónio de Sousa Wines) et Filipa, bien sûr (Filipa Pato Wines). Le Bairrada ne serait pas ce qu’il est sans sa petite dose de piment. Carlos Campolargo, le « Mister No » local, a une voix de stentor qu’il balance à travers ses vignes, fier et provocateur. Volubile et expansif, ce producteur connu pour ses velléités de résistance prétend que le baga est « bien trop rustique » et que sa superficie fond en réalité comme neige au soleil. Il dit aussi que les mousseux du Bairrada sont constitués de « tout sauf de baga », caladoc, merlot, syrah, tempranillo, qu’importe. Son sourcil se fait soupçonneux : « Moi, je connais mes raisins et ce qu’il y a dans ma vigne. Le reste… ». Lui préfère le pinot noir. L’immense terrasse qui prolonge sa cave familiale donne sur un parterre de vignes dont plusieurs parcelles (en tout neuf hectares) semblent à deux doigts de l’arrachage. Là, il compte remplacer les trésors locaux par le cépage bourguignon en lui offrant, à terme, trente-cinq hectares d’expression. Il n’empêche, lors d’un dîner somptueux autour d’huîtres et d’un énorme maigre tendrement cuisiné, il sert en dessert, sur une soupe de fraises à tomber de sa chaise, un assemblage de baga et de castelão des plus fins, carafé pour l’occasion. Bref, il l’a dans la peau.

10 à suivre

Luis Pato, la région lui doit tout
56 hectares, dont 45 en production
300 000 bouteilles

Le producteur le plus connu du Bairrada eut la bonne idée de présenter ses vins à Londres dans les années 1980. Exigence à l’anglo-saxonne, défense des cépages locaux, expérimentations et prises de risque. Un vigneron comme on les aime.
luispato.com

Filipa Pato, la relève biodynamique
30 hectares, dont 20 en propriété
120 000 bouteilles
La fille de Luis Pato, elle aussi chimiste de formation, a démarré son projet en 2001 en achetant des raisins de vieux pieds de vignes pour comprendre le terroir et les cépages. Avec son mari, le sommelier belge William Wouters, elle a fait un pas de plus en 2006 en créant le domaine. Ils étaient au Japon quand je suis passée, mais j’ai découvert un de leur vin au restaurant Rei dos Leitões, servi sur une entrée qui rassemble les produits de la côte (gambas, couteau, ameijoas ou palourdes, langouste). Filipa s’inspire, entre autres, des délicieuses Lalou Bize-Leroy et Marie-Thérèse Chappaz.
patowouters.com

Luis Gomes, vive la craie
5 hectares
20 000 bouteilles
Luis Gomes est venu à la vigne récemment. Il a vendu sa boîte (il était dans la chimie) pour se lancer dans l’aventure. Son idée : mettre la main sur des vieilles parcelles qualitatives peu à peu abandonnées par des viticulteurs trop vieux (il les loue ou les achète). S’il manque de main d’œuvre, il arrive que ces mêmes papys viennent lui donner un coup de main ! Il privilégie les terrains calcaires et en a fait sa marque (Giz).
gizbyluisgomes.com

Mário Sérgio Alves Nuno, du grand classique
30 hectares, dont 25 en production
110 000 bouteilles
Il faut l’appeler le vigneron de Bairrada. Sur sa Quinta das Bágeiras, qu’il a créée en 1989, il vinifie ses propres raisins issus de 25 hectares, n’en achète ni n’en vend. Sa cave vous fera rêver. Des foudres, des lagares, des lits de bouteilles couchées au frais en attendant le temps. Un alambic pour les finitions. « Toutes les bouteilles ont une histoire », raconte-t-il.
Il a travaillé dix ans avec son grand-père. Emotion garantie.
quintadasbageiras.pt

Rui Prior Lucas, la nouvelle vague
6 hectares, 20 000 bouteilles
(dont 15 000 d’espumante)
Cet ex-manager dans le bâtiment s’est lancé comme Luis Gomes il y a peu. Il partage un hangar à Souselas avec sa sœur qui fait de l’huile d’olive. Sa production montre un sacré savoir-faire. Il bouillonne d’idées et d’initiatives. Il utilise notamment, pour ses vins tranquilles, des bouteilles qu’il recycle lui-même en faisant le tour des commerçants
et des restaurateurs.

São Domingos, bulles au pluriel
100 hectares + achat de raisin
4 millions de bouteilles
Cette maison fondée en 1937 produit quatre millions de bouteilles par an, dont un million dort dans les caves creusées dans la roche.
cavesaodomingos.com

Adega de Cantanhede, une coop’ au top
1 000 hectares
5 millions de bouteilles
Lancée en 1954 avec une centaine d’associés, la plus grande coopérative de la région en compte aujourd’hui cinq cents, répartis sur un millier d’hectares. Elle produit 30 à 40 % des volumes régionaux selon les années, d’où une grande responsabilité locale et sociale. La gamme est large et les vins sont bien faits.
cantanhede.com

São João, premières pierres
37 hectares, dont 27 en production et achat de raisin
Entre 400 000 et 800 000 bouteilles
C’est la plus vieille cave de la région, aujourd’hui entre les mains de huit propriétaires. Elle produit du mousseux et du vin tranquille dans un équilibre différent selon le millésime, soit plus de mousseux dans les années fraîches et pluvieuses. La quinta Poço do Lobo est entrée dans son escarcelle en 1971 : 37 hectares d’un seul tenant replantés de baga, moreto (cultivé dans l’Alentejo) et castelão, mais aussi de cabernet-sauvignon et, en blanc, d’arinto et de chardonnay.
cavessaojoao.com

Carlos Campolargo, l’anti-baga
170 hectares
500 000 bouteilles
Carlos a repris les vignes familiales et embouteillé ses vins sous la marque Campolargo en 2000. Le domaine est réparti entre les quintas de Vale de Azar et de São Mateus où fut construite la cave, immense, en 2004.
campolargovinhos.com

Sidónio de Sousa, l’autre roi du baga
12 hectares
70 000 bouteilles
Il fait partie des grands défenseurs du baga et, donc, des Baga Friends. Sidónio de Sousa exprime autour de la commune de Sangalhos la grandeur du cépage avec des cuvées aussi bien effervescentes que rouges.

 

Grand rosé corse, grand vin

Domaine Sant Armettu,
Rosumarinu, corse Sartène 2021

Pourquoi lui
Les plus attentifs de nos lecteurs le savent, nous tenons Gilles Seroin, le propriétaire de Sant Armettu, pour un virtuose de la vinification comme de la viticulture. Son sciacarellu, ses vieux grenaches parlent pour lui et son rosé ne fait pas exception à l’exigence fixée à sa production, sur les collines de Propriano. Ce vin comme les autres est un modèle du genre. Et comme nous sommes…

Lire la suite ici sur le blog bonvivant

Le mondovino de la semaine #199 tourne à fond

Luberon, des vins et des passions • iDealwine, italien jusque dans la peau  • Les nouveaux habits de Carbonnieux • L’émotion de la Marne • Au degré près • Chaque jour du nouveau, en voici cinq

Dans le vignoble


Luberon, des vins et des passions

Depuis l’acquisition du château de Sannes en 2017, Pierre Gattaz se donne les moyens sur son domaine pour démontrer que les vins du Luberon méritent une place de choix dans le cœur des amateurs. Soucieux de défendre l’appellation, il mobilise vingt vignerons et caves coopératives pour créer l’association Les Amis du château de Sannes dont le but est de promouvoir les vins, les producteurs et le terroir du Luberon. Le premier festival Vins et Passions du Luberon sera organisé le dimanche 13 août à Sannes. Les vingt vignerons feront déguster leurs vins, accompagnés par dix producteurs de produits locaux (miel, truffe, huile d’olive, maraîchage, etc.) et dix experts, dont Antoine Pétrus, Meilleur ouvrier de France et dégustateur du guide Bettane+Desseauve, qui animera une table ronde intitulée « Autour du Vin ».

Informations et inscriptions sur www.passion-luberon.com

iDealwine, italien jusque dans la peau

Consultable en français, en anglais et en allemand, le site de ventes aux enchères iDealwine est désormais disponible en italien. Ce pays transalpin occupe la huitième place des « régions » représentées aux enchères en 2022 avec 5 584 flacons adjugés (+32 % par rapport à 2021) et 61 % de l’ensemble des vins étrangers vendus aux enchères. Pour fêter ce lancement et face à l’engouement des acheteurs pour les vins italiens, iDealwine lance du 23 juin au 5 juillet une vente aux enchères de près de 3 000 flacons. Vins accessibles et crus rares, il y en a pour tous les goûts et les budgets.

Vente accessible en ligne sur www.idealwine.com

Les nouveaux habits de Carbonnieux

Fort de presque huit siècles d’histoires et d’un vignoble de cent d’hectares planté sur une croupe de graves, Carbonnieux change l’habillage de ses bouteilles. Appartenant depuis 1956 à la famille Perrin, ce grand classique de l’appellation pessac-léognan séduit par la régularité et la typicité de son style. Cette modernisation concrétise le travail accompli depuis 2017 par Marc et Andréa, la quatrième génération de la famille. Le premier en tant que responsable commercial, le second comme œnologue responsable de la politique environnementale, de la recherche et du développement. Ce nouvel habillage, qui remet le sceau de la coquille dorée au centre de l’étiquette, rend aussi hommage aux moines de l’Abbaye Sainte-Croix de Bordeaux. « Cette coquille dorée est devenue au fil du temps le code identitaire marquant du grand vin blanc de la propriété. Il était naturel de pouvoir la retrouver sur l’étiquette du grand vin rouge », expliquent Éric, Philibert et Christine, troisième génération de la famille.

Plus d’information sur https://carbonnieux.com/

Dans le verre


La reco’ de la semaine : l’émotion de la Marne

Cet assemblage précis (70 % de chardonnay, 15 % de pinot noir, 15 % de pinot meunier) met la vallée de la Marne à l’honneur grâce aux crus Charly-Sur-Marne et Saulchery et aux six parcelles d’où proviennent les raisins et sur lesquelles Jean‑Marc Charpentier pratique une agriculture respectueuse de l’environnement. Frais et apéritif, ce brut vérité possède une jolie vinosité. Une agréable manière de découvrir cet autre grand terroir de la Champagne.

Champagne Charpentier, Terre d’Émotion, brut vérité, 40 euros

L’innovation de la semaine : Au degré près

Après des années de recherches et quelques prototypes plus tard, Anthony Boule et Alexandre Martorana, concepteurs aidés par Sacha Lakic designer lancent Lacarafe, une carafe intelligente. « En dix minutes, LACARAF amène un vin à une température donnée avec une précision au degré près et la maintient pendant toute la durée de la dégustation, quel que soit la température de la pièce », explique Alexandre Martorana, concepteur et sommelier. Son utilisation est simple : il faut choisir la température souhaitée et la carafe fait le reste. « Une appli permet d’avoir des conseils pour définir la température de service en fonction du vin choisi », ajoute Anthony Boule. Ce bel objet pratique a tout de même un prix.

Lacarafe, 590 euros (au lieu de 890 euros, offre limitée) sur https://lacaraf.com/

Diamants bruts, astres roses, la suite

Avec ces chefs magnifiques, la grande gastronomie s’ouvre le chemin d’une grand exploration, celui des rosés de terroir. Il est sûr. Tant mieux, les accords sont une jungle


Cet article est à retrouver en intégralité dans le numéro 32 de En Magnum, actuellement en kiosque


Bruxelles (Belgique)
Menssa
Moins d’un an après avoir fermé son restaurant doublement étoilé, Bon-Bon, et après avoir pris le poste de chef exécutif de La Mère Germaine à Châteauneuf-du-Pape, Christophe Hardiquest ouvre Menssa à Bruxelles, avec un concept nouveau. La salle met en scène un comptoir qui serpente, comme un chemin de traverse ouvert sur la cuisine, au service d’une balade gustative, entre jardin, forêt, terre et mer. La carte des vins, internationale et sans complexe, sublime le voyage

Se souvenir
« Le vin, c’est ma deuxième passion », commente le chef après le service, dans le jardin jouxtant le restaurant où poussent quelques aromates. « Je déguste comme un passionné. J’aime ou je n’aime pas. Je ne bois que du vin ou du champagne. Je réfléchis toujours aux accords. C’est une passion liée à la mémoire sensorielle. Il y a des moments et des vins que je n’oublierai jamais comme un grange-des-pères blanc 2003 ou 2005 – je ne sais plus – au Fat Duck à Londres avec un de mes meilleurs amis, il y a une dizaine d’années. Exceptionnel. Ou avec mon ex-femme un côte-rôtie de chez Jamet au Georges V, il y a vingt ans. Un nez de cuir, de fumé, une syrah de dingue. J’étais à la renverse. Il y a des moments magiques. Pour moi, c’est important d’avoir une carte des vins éclectique. On est en Belgique. Je laisse carte blanche à mes sommeliers, mais j’ai mes goûts et il y a des références que je veux avoir à la carte ; des vins ou des vignerons que j’aime, comme le chenin de Bertrand Jousset, sa cuvée Premier rendez-vous, Gramenon, Madame Laurent, Jamet, Gangloff pour les côte-rôtie, Chave en Hermitage. Des grand noms du vin, c’est comme les grands restaurants. J’ai aussi mes coups de cœurs comme le domaine de la Dourbie en languedoc rouge, un pur carignan sur le fruit. J’aime les vieux millésimes où le bois est fondu, s’il y en a, des vins de garde que je ne bois pas en-dessous de dix ans. J’aime aussi les vins sur le fruit où je sens le terroir et l’encépagement. J’adore les mono-cépages. C’est pour ça que j’adore les vins d’Odile Couvert au domaine de l’Odylée. Un mono-cépage donne un caractère particulier. Le cuisinier n’a pas une vision comme un professionnel, il a besoin de comprendre ce que goûte un carignan, une syrah, un grenache en rouge, un vermentino, un chenin en blanc. J’apprends beaucoup. »

Christophe Hardiquest.

La dégustation
« Je trouve que l’on boit les vins trop jeunes donc je garde des bordeaux, des vins du Rhône, de la Loire. Je pense que ce serait intéressant de le faire sur les rosés qui ont du corps, pour avoir ce développement d’arômes que l’on n’a pas avec les millésimes jeunes ». La dégustation des rosés de terroirs montre qu’un un premier pallier aromatique est franchi à partir de trois ans en bouteille puis un autre à partir de cinq ans. Sur le ceviche de moules de Zélande et mayonnaise de coriandre avec sorbet de « leche de trigre », le chef a voulu associer deux vins du domaine de la Suffrène : le bandol 2022 et la cuvée Sainte-Catherine 2017. Si le premier s’efface devant la puissance du plat, le second lui parle d’égal à égal. « Un vin avec de la charpente, de la tenue et de la longueur. En Bandol, on connaît les blancs et les rouges, mais en rosé, c’était la première fois que j’en goûte » conclut Christophe Hardiquest.

Menssa
Avenue de Tervueren 453
1150 Bruxelles, Belgique

Le mondovino de la semaine #198 tourne à fond

La meilleure jeune sommelière de France 2023 • Issan et Saint-Maur, l’art et la matière • Suntory a 100 ans • Un chablis d’une maison centenaire • Un hommage à son père • Chaque jour du nouveau, en voici cinq

Dans le vignoble


La meilleure jeune sommelière de France 2023

Le concours du Meilleur jeune sommelier de France, organisé par l’Union de la Sommellerie Française, récompense chaque année un sommelier de moins de 26 ans. Les phases finales de cette édition 2023 se sont déroulées en Corse les 11 et 12 juin. « Les dix demi-finalistes se sont affrontés à huis-clos, le dimanche 11 juin à travers de nombreuses épreuves techniques et théoriques. Trois candidats étaient en finale le lundi matin sur scène. Marie Wodecki remporte le concours et devient la 34e meilleure jeune sommelière de France », détaille Fabrice Sommier, nouveau président de l’Union.

Plus d’informations sur https://sommelier-france.fr/concours-meilleur-jeune-sommelier-france-2023/

Issan et Saint-Maur, l’art et la matière

Le château d’Issan à Bordeaux propose du 23 juin au 25 juillet l’exposition « Itinérance {S} » qui met à l’honneur les clichés grand format d’Antoine Thomas, photographe amoureux de la mer et des nouvelles technologies. L’artiste sélectionne et retravaille numériquement ses photographies, partie intégrante de son processus de création photographique. L’occasion aussi de visiter ce magnifique château et de découvrir ses remparts.

http://www.chateau-issan.com/

Au cœur du Golfe de Saint-Tropez, le château Saint-Maur propose E-Raw-Lution. Cette exposition, créée par la Galerie Stay Tuned, investira du 8 juillet au 30 août les trois niveaux du château. Elle présentera les œuvres de quatre artistes : Adeline Halot, Tiffany Bouelle, Florence Denou et Athena Sadoun autour de la matière et de la lumière.

https://www.chateausaintmaur.com/

Suntory a 100 ans

La maison de whisky japonais célèbre cette année son centième anniversaire. Crée en 1923 par Shinjiro Torii, elle est reconnue comme étant la maison pionnière du whisky japonais. C’est à Yamazaki que le fondateur a choisi de construire la première distillerie de malt du Japon. L’aventure s’est poursuivie avec son fils et Keizo Saji, le deuxième Master Blender de la maison. Au fil du temps, Suntory a construit d’autres distilleries à travers le pays notamment celle de Hakushu située à Hokuto à l’ouest de Tokyo. Pour ces 100 ans, Suntory dévoile deux single malt en édition limitée : le Yamazaki 12 ans d’âge et le Yamazaki 18 ans d’âge Mizunara. Le Mizunara est une essence de chêne endémique du Japon. Très difficile à travailler, elle confère un caractère unique au whisky.

18 ans d’âge
Merveille au nez par ses notes de cerise noir relevées par la cannelle et les épices. L’élevage en fûts de chêne Mizunara lui donne de l’ampleur, de la profondeur et un caractère enveloppant plaisant qui met en valeur les notes d’encens japonais, de bois de santal et de noix de coco. Elle est embouteillée à 48% alc./vol.
2 200 euros (70 cl.)
https://house.suntory.com/fr-fr/100-ans-anniversaire

Dans le verre


La nouveauté de la semaine : un chablis d’une maison centenaire

Pour son centenaire, La Chablisienne propose une cuvée spéciale, intitulée 1923, issue de vignes de 20 ans d’âge plantées sur un sol argilo-calcaire du Kimméridgien typique de l’appellation. Au nez, les notes de pêches et d’abricots invitent à la dégustation de ce vin rythmé par son expression minérale, son équilibre et sa finale persistante.

La Chablisienne, Cuvée spéciale 1923, chablis 2020, 17 euros

La reco’ de la semaine : un hommage à son père

Avec la cuvée O Ba ! (papa en corse), Yves Leccia rend hommage à son père Pierre-Joseph. Ce vin bio est composé à part égale de minustellu, de niellucciu et de grenache, cépages de prédilection de son père. Le premier apporte la rondeur, le deuxième, la structure et le troisième, le fruit. Cette interprétation est plus généreuse dans sa texture que le patrimonio classique du domaine. Construite autour du fruit, elle est complétée par des notes de musc et de cuir.

Domaine Yves Leccia, O Ba !, patrimonio rouge 2018, 38 euros

Les vacances du Petit Prince

Au cœur de La Clape, le château L’Hospitalet présente Le Petit Prince et l’Aviateur, une exposition organisée avec la Fondation Antoine de Saint-Exupéry, qui célébre les 80 ans du petit voyageur céleste à l’écharpe jaune. Une autre manière de se plonger de redécouvrir l’un des livres les plus célèbres de la planète

C’est tout un symbole pour Gérard Bertrand : « Aujourd’hui, alors que nous sommes confrontés à des défis majeurs tels que le changement climatique et la préservation de notre environnement, les idéaux du Petit Prince résonnent plus que jamais. Nous devons protéger notre planète et trouver un équilibre harmonieux entre l’homme et la nature. Comme le Petit Prince avec sa rose, nous prenons soin de nos vignes et créons des vins d’excellence en utilisant des pratiques écoresponsables telles que la biodynamie. Je souhaite à nos visiteurs de parcourir cette exposition avec leur âme d’enfant et d’y puiser l’essentiel. »

 

Documents d’archives et art contemporain
L’exploration débute autour d’une sélection d’objets et de documents rares. Des dessins du Petit Prince, des manuscrits inédits ainsi qu’une série d’objets personnels issus des collections de la Fondation évoquent la destinée hors norme de l’auteur, « homme de poésie et d’action (…) à la fois entièrement écrivain et entièrement pilote » comme disait de lui Joseph Kessel, un de ses fidèles amis. Le périple se poursuit avec trois grands artistes contemporains qui apportent leur propre vision.

Notre imagination finit de s’envoler avec le Nord 1000. Cet avion datant de 1934 était le concurrent des avions Caudron Simoun avec lesquels Antoine de Saint-Exupéry participa aux grands raids aériens Paris-Saïgon (1935) et New York-Terre de Feu (1938). Habillé de couleurs et d’inscriptions (les titres des romans de l’écrivain aviateur) par le graffeur Cyril Phan alias Kongo, une star du street art, il trône à côté de ses toiles récentes aux couleurs vibrantes.

Jean-Marc de Pas signe quant à lui une série de sculptures en bronze inspirées par les aquarelles originales des astéroïdes de Saint-Exupéry qui illustrent Le Petit Prince. Et le bédéiste Cédric Fernandez, auteur d’une splendide trilogie Antoine de Saint-Exupéry (Editions Glénat), nous embarque au fil d’une sélection de tirages en grand format de ses plus beaux dessins. Dépassant le cadre de l’Espace d’Art de l’Hospitalet, l’exposition investit aussi les intérieurs et extérieurs du château, s’offrant même une extension nocturne en projection sur les façades des bâtiments. Un moment magique à découvrir à la nuit tombée, la tête dans les étoiles qui, rappelons-le, « sont éclairées pour que chacun puisse un jour retrouver la sienne. »

Le Petit Prince et l’aviateur
Jusqu’ au 25 septembre 2023, exposition libre et gratuite (tous les jours de 9h à 20h), projections nocturnes à partir de 22h.

Château L’Hospitalet
Domaines Gérard Bertrand
D168, 11100 Narbonne.
04 68 45 28 50

Un été rouge

Trois vins. Trois prix. Trois provenances. C’est l’été des rouges. Pas question aujourd’hui de grands crus, de gros tarifs. On veut du léger, mais du goût. On veut des arômes, mais des surprises. En voilà.

Moins de vingt euros

Domaine Andrée, l’Envolée, IGP val-de-loire 2015.
Le cépage est le grolleau noir, ici assemblé à du grolleau gris. On n’en boit jamais du grolleau. On a tort, c’est très bon, très friand, structuré sans excès. On ne touche pas assez le grolleau. Le millésime est bien

 

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En Magnum #32, chez votre marchand de journaux

Le monde du vin change plus vite que nous le pensons. Trois tornades conjointes viennent chacune heurter de plein fouet son rythme ancestral et profondément remodeler ses frontières, ses hiérarchies, parfois sa nature. La première – et sans doute la plus fondamentale – est le bouleversement climatique et écologique que nous vivons. Comme toute activité agricole, le vin se trouve sur la ligne de front. Elle modifie autant le caractère de la production que sa géographie. L’eau, en particulier, devient un enjeu essentiel. Ce trésor n’est pas partagé partout de manière équitable. L’irrigation n’apparaît plus aujourd’hui comme une garantie de développement tous azimuts des vignobles. La spectaculaire mondialisation du vin constitue le deuxième souffle du bouleversement. En se développant partout, de la Chine à l’Argentine, en passant par la Californie et la vieille Europe, le vin s’est installé sur le créneau du luxe et de la haute personnalité, bien loin de l’image de produit basique qu’il a eue pendant des siècles dans les pays consommateurs. La transformation extraordinaire du vignoble provençal, que nous explorons et analysons en détail dans ce trente-deuxième numéro d’En Magnum, en est un exemple formidable.
Le consommateur dicte aussi son agenda. On glosait il y a vingt ans sur l’abandon du vin par les jeunes générations. Il n’en a rien été, mais ces nouveaux amateurs imposent peu à peu leurs goûts et une vision différente. Moins de rouges structurés et de garde, plus de rosés, de blancs et de bulles, de nombreuses tendances stylistiques ou éthiques, la carte des vins se modifie en profondeur durablement. Jamais, en quelques millénaires d’existence, la civilisation du vin n’aura été soumise à de si forts courants. Les observer et les apprécier sans se laisser emporter par des flots parfois contradictoires ne manque pas d’intérêt pour les amateurs que nous sommes.

En Magnum#32, chez votre marchand de journaux (à partir du vendredi 16 juin) et sur notre site ici.