La Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS) a présenté les chiffres 2019 à Vinexpo Paris. Ils sont bons, mais les inquiétudes montent en ce début 2020.
La locomotive spiritueux
Cocorico. Les chiffres 2019 sont bons, avec 14 milliards d’euros d’exportation de vins et spiritueux, en hausse de 5,9 %, soit le deuxième excédent commercial français derrière l’aéronautique. Rentrer dans le détail des chiffres est passionnant. On constate que la croissance est tirée par les spiritueux, +8,8 %, plus que par les vins, +4,4 %, même si on exporte beaucoup plus de vins, 9,3 milliards, que de spiritueux, 4,7 milliards. Concernant les vins, on constate que la croissance se fait en valeur beaucoup plus qu’en volume, puisque ces derniers montent seulement de 0,7 %. En clair nos vins chers se vendent de plus en plus chers, mais on ne vend pas vraiment plus de vin.
Les aléas des marchés internationaux
Là où le tableau commence à être moins reluisant, c’est quand on regarde les marchés qui tirent cet export. Le principal, ce sont les USA, avec 3,7 milliards d’euros. Patatras, Trump, pas content qu’on subventionne Airbus, a mis 25 % de taxes en plus sur les vins français. Le résultat s’est fait immédiatement sentir avec une baisse de 17,5 % des importations aux USA au quatrième trimestre 2019. Et si on veut taxer les GAFA, il nous menace de mettre 100 % de taxes sur le vin. Tant pis, rabattons-nous sur la Chine, le deuxième marché export. Patatras, voilà que le coronavirus, officiellement appelé Covid-19, met la Chine à l’arrêt. Heureusement que le troisième marché se porte bien. Oui mais non, car le Royaume-Uni a bel et bien décidé de sortir de l’Union Européenne, ce qui laisse planer un doute sur nos échanges futurs.
1 000 kilomètres autour de Paris
Antoine Leccia, président de la FEVS, en appelle aux pouvoirs publics, évidemment, car la filière estime qu’elle va perdre 300 millions de chiffre d’affaires en 2020. Mais on envisage mal l’État français mettre la main à la poche pour palier les aléas du commerce. Il a de toute façon dit qu’il fallait voir ça avec l’Europe. La conclusion, c’est que la France s’est beaucoup tourné vers l’export ces derniers temps. Avec raison, car la consommation nationale baisse, et avec succès puisqu’on vient de connaître une décennie mirifique pour nos écuries de compétition dans le Bordelais, en Bourgogne et en Champagne. Mais la réalité de la décennie 2020 risque d’être très différente de celle de la décennie 2010. La montée-en-gamme c’est bien, évidemment, mais le pouvoir d’achat lui ne monte pas beaucoup, en tous cas en Europe. Et, on le voit, le grand export se grippe, avec une concurrence féroce, notamment en Chine où les vins français viennent de se faire ravir la place de premier exportateur par les vins australiens, qui bénéficient d’une exemption de taxes. Du coup, la filière va devoir se retrousser les manches. Et, comme le disait le bourguignon Louis-Fabrice Latour en aparté de la conférence, redécouvrir les marchés traditionnels va devenir une nécessité. Le fameux « 1 000 kilomètres autour de Paris ». En clair, le client qui a l’accent allemand ou belge ne va peut-être plus devoir patienter derrière le client chinois. Et les prix vont peut-être enfin se calmer.
Photo d’ouverture : Louis-Fabrice Latour explique qu’il faut prendre l’export à bras le corps.