Ça bouge du côté d’Angers où les vignobles ligériens viennent d’enchaîner la Paulée de l’Anjou et le Congrès International du Chenin. Ces deux manifestations incarnent les nouvelles ambitions de la région.
La Paulée de l’Anjou n’est pas un événement nouveau. Mais elle a pris une nouvelle dimension. Au cœur de l’événement, un homme-clef, Ivan Massonnat. Ce financier parisien a racheté en 2018 le domaine de Jo Pithon et l’a agrandi pour arriver à 25 hectares. Il a de grandes ambitions pour son domaine, nommé Belargus, mais aussi pour la région. Habilement, les vignerons lui ont laissé prendre la présidence de la Paulée à laquelle il a immédiatement voulu donner un nouvel élan. Il a réussi à fédérer le saumurois, pour que cet événement ne soit plus seulement celui de l’Anjou Noir. Il y avait donc ce dimanche 30 juin, 500 personnes au banquet gastronomique du Grenier Saint-Jean, une grande dégustation de domaines bios et biodynamiques l’après-midi à la coulée de serrant, des sommelières internationales (Pascaline Lepeltier, Paz Levinson) et des annonces importantes puisque l’événement aura lieu à Saumur l’année prochaine et sans doute un jour… à New-York.
Un congrès mondial
Cette Paulée new-look s’est doublée dès le lendemain d’un congrès sur le chenin au palais des congrès d’Angers. Organisé par l’Académie du Chenin, présidée par Evelyne de Pontbriand (Domaine du Closel à savennières), il réunissait 200 participants, dont 45 sud-africains, pour parler histoire, paysages, économie, changements climatiques. Une cession sur le goût, animée par Gabriel Lepousez de l’Institut Pasteur, fut passionnante. On a aussi appris que l’autre parent du chenin, le premier étant le savagnin, était… la sauvignonasse. Un nom pas sexy pour désigner un cépage aussi appelé sauvignon vert ou friulano. Des visites ont permis aux visiteurs de découvrir les vignobles environnants.
Un cépage, plusieurs approches
On pouvait aussi déguster 350 vins de chenin du monde entier. Cela permettait notamment de comparer ses identités. Les Sud-Africains, qui produisent beaucoup plus que la France, avec 18 000 hectares plantés en chenin, proposaient beaucoup de vins de grande consommation, standardisés aromatiquement et pourvus de l’incontournable capsule à vis. Les Français, fidèles à leurs AOC et à leurs bouchons, présentaient une offre plus complexe mais souvent plus qualitative. Si certains, comme le Domaine du Closel ou le Domaine Ogereau confirment qu’ils sont des références, on a aussi pu découvrir des nouveaux comme Pierre Menard ou Le Fief Noir qui nous ont donné un goût de « revenez-y ».
La Loire affirme de nouvelles ambitions, notamment vis-à-vis de ses vins blancs secs. Si la région a toujours été appréciée pour son activisme et sa disparité, il lui a longtemps manqué un mouvement collectif et des porte-étendards qualitatifs de taille. Si la révolution ne se fait pas en un jour, et que la cohésion est toujours plus difficile à créer que la zizanie, il nous semble que ces quatre jours ont incarné les prémisses de changements fructueux.
Photo d’ouverture : Le critique anglais Jim Budd, le vigneron ligérien Emmanuel Ogereau et le vigneron sud-africain Ken Forrester trinquent au succès du congrès du chenin.