La campagne d’information lancée cette semaine par le ministère des Solidarités et de la Santé et l’Institut national du cancer fait réagir l’organisme Vin & Société, au nom des 500 000 acteurs de la vigne et du vin en France. Constatant son déploiement massif « alors que les exploitations viticoles françaises sont en pleines vendanges et que se déroulent les traditionnelles foires aux vins de la rentrée », Joël Forgeau, vigneron et président de Vin & Société se déclare particulièrement indigné par cette campagne et notamment par le fait que l’affiche incitant à diminuer sa consommation d’alcool soit illustrée par un tire-bouchon, « symbole de la consommation de vin, du partage et de la convivialité. »
Outre le fait de réduire le vin à une « molécule d’éthanol » et de lui imputer symboliquement « la responsabilité des cancers liés à la consommation d’alcool en général », cette campagne opère selon Vin & Société un glissement du discours de santé publique. « Visant à passer de la lutte contre la consommation excessive d’alcool à l’idée que toute consommation est nocive, même en quantité minime » et s’adressant à l’ensemble de la population française (et pas spécifiquement aux populations à risque), cette campagne s’inscrit à rebours du travail de la filière en faveur d’une consommation responsable basée sur des repères chiffrés facilement compréhensibles par les consommateurs *.
Rappelant que la consommation de vin a profondément changé en France, baissant de 60 % entre 1960 et 2015, qu’un Français sur deux est un consommateur occasionnel (1 à 2 fois par semaine), que 15 % des Français sont des consommateurs réguliers de vin et que 33 % sont abstinents, Vin & Société souhaite défendre une consommation modérée et de plaisir tout en menant la lutte nécessaire contre la consommation excessive d’alcool et les risques afférents. Dans cette optique, Joël Forgeau a renouvelé la demande de Vin & Société d’un dialogue constructif avec les pouvoirs publics afin de « bâtir une approche équilibrée entre santé, éducation, culture, viticulture et économie. »
* En juin dernier, la filière viticole avait spontanément pris acte des nouveaux repères de consommation à moindre risque proposés par un groupe d’experts sous l’égide de Santé Publique France* : un maximum de 10 unités d’alcool par semaine pour les hommes comme pour les femmes, soit 100 g d’alcool pur par semaine (dans les autres pays ayant adopté des repères de consommation, ceux-ci vont de 98 à 140 g pour les femmes, et de 150 à 280 g pour les hommes ; source : Governmental standard drink definitions and low-risk alcohol consumption guidelines in 37 countries, étude parue dans le journal Addiction en avril 2016).