Ratatouille et abricots

C’est la règle depuis le début d’En Magnum, Antoine Pétrus, tel l’oracle, nous donne ses meilleures idées autour de thèmes de saison. Un plat, des vins

La ratatouille
Chaude, tiède ou froide, Antoine ? « Plus c’est froid, plus les saveurs sont enfermées. » Nous voilà prévenus. La saveur première de chacun des légumes fonctionnent mieux dans le chaud. Ou le tiède. Pour ce fin gourmet, l’idéal est de maintenir le plat à la température de cuisson, c’est un mijotage. « C’est un plat pour les rosés. Plus froide, on accordera la ratatouille avec un vin primaire, un vin de l’année, le 2016 du domaine de Fontenille ou celui du domaine des Pallières, un gigondas rosé. » Le domaine des Pallières appartient à la famille Brunier qui produit aussi un grand châteauneuf-du-pape au Vieux Télégraphe. « Avec une ratatouille plus chaude, cherchons un rosé plus charnu, à mi-chemin entre l’acidité d’un blanc et le léger tannin d’un rouge. La cuvée Rose de Pradel 2015 du domaine La Terrasse d’Élise, du côté d’Aniane. Une saignée faite sur des cinsaults, douze mois d’élevage en barriques, une vraie couleur. » Antoine enchaîne avec la cuvée Parisy, un de ses vignerons favoris, Emmanuel Reynaud. « C’est une cuvée non millésimée que je mettrais six à sept ans en cave. C’est un vin onctueux que je servirais à 14-15°C, comme un rouge frais, histoire de pousser l’idée jusqu’au bout. »

La tarte aux abricots
« Ce qui me fascine dans ce fruit, c’est qu’il est aussi acide qu’il est sucré, c’est un fruit vibrant. » Maintenant, je regarde l’abricot avec d’autres yeux. Merci, Antoine. Dans ce cas de figure et avec un vin moelleux qu’il jugera plus sur son acidité que sur son sucre. « Je pense particulièrement à l’excellent coteaux-du-layon, chaume premier cru, du Clos de l’Élu, en Anjou. Un nez d’une brillance et d’une clarté impressionnantes. On sent la baie à son stade parfait de surmaturité. » Antoine nous parlera du vigneron et de ses convictions. « C’est courageux de se donner du temps et du mal pour refaire de grands moelleux. » Ce que ne démentiront pas ceux du domaine de L’Alliance, à Sauternes. « C’est une micro-propriété qui nous donne une expression contemporaine du botrytis, très digeste. Ce sauternes 2016, jeune, n’est pas dissociable de l’assiette. » Autre idée, un muscat du Cap-Corse 2016 du domaine Pieretti. « Je crois plus que jamais au muscat dans les vignobles du Sud. C’est un muscat fortifié, muté, un muscat subtil, nuancé, qui ne se livre pas d’évidence. En fait, c’est ça que j’aime dans le muscat. » Nous voilà parés pour l’été.

 

Antoine Pétrus, sommelier surdoué et directeur général du restaurant (et du groupe) Taillevent, une institution qui vient de voir entrer dans son giron une autre institution majeure de la grande restauration parisienne, le célèbre Drouant.

Cette chronique a été publiée dans EnMagnum #12 sous une forme différente.
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