Denis Dubourdieu est mort

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Nous venons d’apprendre avec une infinie tristesse la disparition de Denis Dubourdieu. Nous le savions atteint depuis quelque temps d’une implacable maladie qui plus encore que les souffrances physiques le minait par la conscience de la diminution de ses facultés intellectuelles. Je dois personnellement beaucoup à l’homme, au grand vigneron et au grand professeur d’œnologie pour tout ce qu’il m’a appris. Son existence et sa vigilance m’obligeait en tant que critique à être le moins possible sujet à la terrible force de son esprit critique. Son intelligence mordante, jamais méchante, doublée d’un humour redoutable qu’il savait aussi appliquer à lui-même, le rendait en effet impitoyable envers toutes les inexactitudes et les paresses qui ne manquent hélas pas dans notre profession. Son rôle dans l’évolution du vin de Bordeaux contemporain a été considérable. La disparition du professeur Peynaud laissait un grand vide qu’il a très vite comblé avec une personnalité fort différente de son maître, doublée d’un parcours personnel lui aussi très différent.

Né d’une célèbre famille de Barsac, propriétaire entre autres de château Doisy-Daëne, avec un père parmi les vinificateurs les plus précis et les plus pointus du secteur, il avait épousé Florence David et pris en charge les propriétés de son épouse, plus quelques fermages, ce qui lui donnait 200 hectares à cultiver et à vinifier et, donc, une expérience de terrain formidable. Ses études brillantes d’agronomie et d’œnologie à Montpellier lui avaient permis d’acquérir des connaissances scientifiques rigoureuses qu’il a su mettre à la disposition de ses nombreux élèves de l’Institut des sciences de la vigne et du vin, dont il fut un grand président. En tant que conseiller de nombreuses propriétés viticoles à travers le monde, il se battait contre tous les excès à la mode et les tentations de plaire à tout prix. Son idéal du vin était celui de l’expression juste, équilibrée et élégante de tous les cépages, tous les terroirs, tous les millésimes. Bien sûr, il restera dans l’histoire comme un incomparable vinificateur de vins blancs, mais j’admirais encore plus son talent à comprendre toutes les nuances de saveur et les subtilités du tannin des raisins de cabernet-sauvignon, son cépage favori.

Je tiens, avec mon équipe, à témoigner à sa famille, son épouse Florence, ses enfants, qui l’épaulaient depuis de nombreuses années dans ses propriétés, et à tous ses amis notre profond chagrin et à partager leur douleur.

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