À SUIVRE | >Vendredi 15 juillet : Heinrich Hartl, hier et aujourd’hui >Lundi 18 juillet : les deux stars, rotgipfler et zierfandler>Mercredi 20 juillet : cinq producteurs de Thermenregion au top |
En chiffres
2 196 hectares
900 producteurs
25 % à l’export
Connaissez-vous le zierfandler et le rotgipfler ? Deux cépages blancs emblématiques de la région des Thermes, au sud de Vienne. En rouge, le saint-laurent et le zweigelt donnent la réplique avec justesse. Et cerise sur le gâteau, des pinots noirs autrichiens à découvrir d’urgence. Un petit séjour sur place est encore le mieux, pour trinquer dans les Heuriger.
Vingt minutes de train seulement. Distance Paris-Versailles. Mais un dépaysement total, loin des odeurs de diesel. Le vignoble s’étend au-dessus d’une vallée grouillante de vie et d’industrie, contre le mont Anninger et ses 675 mètres et la grande forêt de Vienne, Wienerwald, qui protège du froid et des pluies et donne du bois pour la futaille. Deux mille hectares de vignes, les raisins blancs cultivés plutôt au nord, les rouges plus au sud. Les bains comme la vigne nous viennent des Romains, d’où ce nom de Thermenregion. Au Moyen Age, les moines cisterciens y ont développé le vignoble et l’Eglise possède encore de nos jours des terres à vigne qu’elle met en location. Les Viennois aiment venir flâner dans ce coin de verdure et se perdre dans les rues pavées de Gumpoldskirchen avec sa source historique et son curieux menhir à la forme évocatrice. Ou faire un tour à bicyclette dans les chemins de vigne pour finir attablés dans une Heuriger, ou Buschenschank, ces restaurants-tavernes où le vigneron enfile son tablier de service. On y mange chaud ou froid selon le cas, mais surtout on arrose le Wiener Fleischlaberln (boulettes de viande) ou Hausmannskost (cuisine maison) du vin du patron. Pas le classique pichet de vin de table en 50 cl. La gamme complète du producteur, s’il vous plaît, à peine plus chère sur table qu’au caveau, 7 ou 8 euros la bouteille, 15 euros peut-être si le millésime a de l’âge.
Karl Alphart réunit dans un mouchoir de poche son restaurant, doté d’une immense cour ombragée, une boutique design où tous ses vins sont exposés et, juste derrière ces vitrines alléchantes, l’usine de production, une cuverie moderne et pratique. Ce soir d’été, il court dans la salle bouteilles aux poings, fait la causette à ses clients en leur servant le vin, pendant que Madame est aux commandes derrière les plats. Au service, le fiston participe à cette folie temporaire. Les habitués se retrouvent en famille ou entre amis, chantent et trinquent, consomment et repartent avec, dans des cartons, de quoi poursuivre à la maison l’hommage au vigneron. Tout le monde y gagne. A se demander pourquoi un tel modèle n’existe pas en France alors qu’en Autriche, il est multiséculaire et multirépandu. Les Heuriger remontent à 1784 lorsque l’empereur Joseph II établit une loi pour gérer les boustifailles auxquelles s’adonnaient les vignerons au passage de leurs clients. Le petit coup de rouge sur le coin de la table de la salle à manger prit tellement d’ampleur qu’il fallut mettre de l’ordre. Depuis plus de 230 ans, la gestion au cordeau du système permet aux Viennois de ne jamais trouver porte close, sept jours sur sept. Karl et Elisabeth Alphart ouvrent trois semaines d’affilée tous les deux mois, en alternance avec leurs acolytes à double vie. Un calendrier est même disponible pour que le public puisse organiser ses sorties chez tel ou tel vigneron.