« La quantité n’a aucune importance à mes yeux. Je veux faire les meilleurs vins possibles sur les plus grands crus. » Joseph Henriot, qui vient de disparaitre, prononçait ces mots comme une profession de foi alors que nous lui remettions, il y a vingt ans, le titre d’Homme de l’Année. Il venait alors de reprendre en main, après un long passage à la tête de Veuve Clicquot (1987-1994) la direction de sa maison de champagne et, surtout, d’acquérir Bouchard Père et fils, belle endormie qu’il replaça immédiatement, et sans la moindre faute de carre, au premier rang des maisons bourguignonnes. L’œil vif et rieur, l’esprit perpétuellement aux aguets, Joseph Henriot a été certainement l’une des intelligences les plus brillantes qu’il nous ait été donné de rencontrer au cours de notre carrière. Sa clarté de vision s’associait logiquement à une grande confiance en ses moyens ; s’il savait écouter, il savait surtout décider, tranchant parfois dans le vif et non sans douleur pour ceux, fussent-ils très proches, qui se trouvaient sur sa route. Mais, alors que cet homme hors norme tire sa révérence, il faut applaudir l’œuvre extraordinaire du bâtisseur qu’il n’a cessé d’être. Au début de l’ère LVMH, comme Yves Bénard chez Moët, il a su permettre à Clicquot d’entrer en majesté dans la nouvelle ère du champagne, laissant par ailleurs en cadeau de départ le sauvignon néo-zélandais Cloudy Bay qui est devenu l’une des plus belles success story du groupe. Et en vingt ans, il a avec ses fils Stanislas, puis Thomas fait de son groupe familial – les champagnes Henriot, les chablis William Fèvre, les bourgognes Bouchard Père et fils, le beaujolais Villa Ponciago à Fleurie, les liqueurs Lejay-Lagoutte – un diadème d’un extraordinaire éclat. Chapeau bas, Joseph.
A ses fils Stanislas et Thomas, à l’ensemble de sa famille, l’équipe de Bettane+Desseauve adresse ses plus sincères condoléances.
Michel Bettane et Thierry Desseauve