La Grande Maison est grande ouverte

C’est fait, Bernard Magrez et sa fille Cécile ont donné mardi soir le dîner inaugural de la Grande Maison, sa dernière idée pour Bordeaux.
De quoi s’agit-il ?
D’un pari rendu possible par la claire conscience que la paire Magrez-Robuchon a d’être gagnante en soi. Que les compétences de chacun en matière de luxe, d’attention au client, de qualité de la production, de sens du détail pouvaient permettre de caresser l’idée d’un grand restaurant étoilé (trois fois, de préférence) à Bordeaux, qui n’en a plus depuis longtemps. Deux grands pros, ça va plus vite et c’est ce qu’il se passe. Les trois-étoiles, indispensables pour motiver la clientèle internationale, ne tomberont sans doute pas en février, mais on peut raisonnablement penser qu’un cuisinier mythique ayant déjà 28 étoiles au Michelin pour ses restaurants du monde entier devrait passer à 31 sans trop de difficultés. Avec Bernard Magrez aux cordons de la bourse, on est rassuré côté gestion. Cet infatigable entrepreneur a acquis et restauré divinement un hôtel particulier du XIXe, d’un style résolument XVIIIe donc, pile en face de l’hôtel Labottière où il a installé sa fondation culturelle dans un bâtiment encore plus beau que la Grande Maison. L’un donnant la réplique à l’autre, chacun de son côté de la rue, l’affaire a beaucoup de gueule, Bordeaux côté faste. Pour faire plus Magrez encore ce nouvel établissement, Bernard a planté l’un de ses précieux et très anciens oliviers, ici comme à Pape-Clément, La Tour-Carnet et Fombrauge et, sans doute ou bientôt, au Clos Haut-Peyraguey. Je n’ai pas vu les autres depuis plusieurs mois, mais celui-là est en pleine forme avec sa ramure vigoureuse et pleine et ce tronc énorme et creux. Il a deux mille ans, comme nous.
L’intérieur, la distribution des pièces, est d’époque avec une enfilade de salons pour le restaurant et un grand salon pour le bar. La décoration met l’accent sur un confort cossu de nature à rassurer la clientèle des palaces, Bernard Magrez connaît ses classiques.
Et, à table, Robuchon déroule ses interprétations de la grande gastronomie française avec l’aisance que confère le savoir-faire, c’est formidable. Le livre de cave pèse son kilo, il renferme une collection incroyable de bordeaux, tous les classés et beaucoup d’autres, millésimes, formats, les choix sont immenses puisqu’ils ne sont pas réservés aux bordeaux. C’est aussi la plus belle collection de vieux millésimes de veuve-clicquot qui se puisse trouver.
Maintenant, chaque soir, Joël Robuchon va accompagner le lancement en cuisine avant de laisser le volant dans quelques semaines à Tomonori Danzaki, 20 ans de Robuchon, trois-étoiles à Tokyo et à Vegas, pas le perdreau de l’année non plus.
C’est assez fascinant de voir comment une équipe super-pro est capable de sortir de sa manche en moins de dix-huit mois un wannabe pareil. Ce qui explique que nous suivrons le développement de cette histoire de très près. C’est passionnant, le succès.

À lire aussi