Propriété historique majeure avant d’être le vin d’un homme, Pape-Clément est à son meilleur depuis 1985-1986, époque de la reprise par Bernard Magrez. C’est une des quelques propriétés bordelaises mythiques, de celles qui symbolisent et résument toutes les qualités que l’amateur recherche dans un grand vin rouge de Bordeaux. Pape-Clément y ajoute une personnalité qui lui est propre. Depuis environ un quart de siècle, Bordeaux n’a jamais produit de meilleurs vins. Il n’y a plus de millésime médiocre et les crus progressent encore. Cette verticale 2009-1988 en fait, une fois de plus, la démonstration éclatante. Pourtant, il y a dans les vins du château Pape-Clément une constance qu’on ne retrouve pas partout. Pape-Clément est avant tout un cru qui donne une définition claire de son terroir. Le caractère truffé et précis du grain, la texture et le soyeux de la chair, c’est l’essence même d’un grand pessac. Combien de propriétés peuvent afficher une telle régularité sur une séquence de vingt-cinq ans ?
Bernard Magrez était un industriel des vins et spiritueux, loin des logiques des grands vins. Cependant, Il a tout de suite compris que Pape-Clément était un grand cru et qu’il fallait le mener comme tel. Peu à peu, il a affiné le processus d’élaboration en soignant les détails à toutes les étapes du process, sans jamais perdre de vue l’objectif de tout propriétaire de grand cru classé : le sommet. Les anglais disent qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands marchands. Les Américains prétendent qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands critiques. On s’aperçoit surtout qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands propriétaires, administrateurs, actionnaires. Tous les grands bordeaux sont poussés sur le chemin du succès et de l’amélioration permanente par des propriétaires qui y mettent leur passion, leur argent, leur temps et leur capacité à prendre des décisions au bon moment. Bernard Magrez a joué ce rôle pendant les trente dernières années, et le résultat est là. Certes, Il y a des équipes qui ont très bien travaillé, mais surtout il y a un cap qui a été défini et une impulsion qui ne faiblit pas.
2009
Ce vin est moins explosif qu’à sa naissance, mais il a gardé le velouté de texture et la noblesse de tanins des premiers jours. Il se dirige vers les arômes fumés et très particuliers des grands pessacs.
2008
Vin équilibré, épicé. De la fraîcheur et une belle vivacité à ne pas confondre avec de la minceur. Finesse de tanin, on retrouve une énergie tonique et de la sveltesse.
2007
Finesse de tanins, raffinement de toucher. Éclat de fraîcheur qui accompagne une finale magnifique. Vin avec un potentiel de garde phénoménal.
2006
Caractère épicé, arômes typiques de pessac-léognan, note de truffe. Tanin plus solide que les crus précédents. C’est le premier millésime de cette série qu’on voit entrer dans une seconde phase aromatique avec ce nez de truffe et d’épices.
2005
Très beau cru, raisins mûrs. Très complet avec de la chair, mais des tanins qui sont sur la fermeté plus que sur l’épanouissement. On peut le laisser longtemps en cave.
2002
Vin très réussi, très équilibré. On a le côté épicé, fumé, des arômes de cuir. Vin très joli qui a l’âge d’être bu et qui a de la classe. Qualité et soyeux des tanins. Une chair très élégante.
2000
L’année du millenium ne pouvait être que grande. De la finesse, une chair dans l’élégance, des arômes purs, du dynamisme et de la profondeur. On retrouve la pureté du cru. C’est magnifique.
1995
Ce vin est dans la fin de sa deuxième phase avec des arômes de sous-bois. Il conserve en finale une note de fraîcheur mentholée. Beaucoup de délicatesse, nez complet. C’est un vin pour les grands amateurs, délicieux à table.
1990
Millésime abondant avec des raisins mûrs, la matière est riche et élégante, subtile et soyeuse, mais on sent une très légère dilution. il y a du volume, du soyeux et une belle qualité de tanins.
1988
Vin très classique dans ses équilibres, mais un peu austère. On retrouve une qualité de fraîcheur, de tanin, de fruit ainsi qu’une note de champignon. Belle netteté. En finale, cette austérité se transforme en une élégance fine et fruitée.
Michel Bettane et Thierry Desseauve
Photo : Mathieu Garçon