Un peu de folie au Clos de Vougeot

Quelques ouvrées seulement séparent le château du Clos de Vougeot et sa folie, une coquetterie du XIXe qui renaît en version luxe grâce à deux vignerons et un œnophile passionnés


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« Il subsiste une bicoque dans le Clos de Vougeot (…) qui devrait être démolie depuis longtemps », écrivait Jean-François Bazin dans son Dictionnaire universel du vin de Bourgogne (2010). L’édifice, en ligne de mire du château restauré, était à l’abandon depuis des décennies dans l’indifférence de la majorité de ses nombreux copropriétaires. Deux d’entre eux pourtant ne supportaient plus de voir cette ruine à quelques grains de raisins du fleuron le plus célèbre du patrimoine bourguignon : Frédéric Drouhin, président du directoire de la maison Joseph Drouhin, et Étienne de Montille, propriétaire du domaine de Montille. Ils sont devenus les actionnaires principaux de ce nouveau lieu qu’est La Folie de Vougeot. Avec l’assentiment de la Confrérie, de l’édile local et le soutien financier du Canadien Greg Pelling, œnophile et mécène (du festival Musique & Vin au Clos de Vougeot, notamment), ils ont tirée cette petite bâtisse remarquable de l’oubli. Parquet Versailles et pièces d’Art nouveau français d’origine ont été restaurés et l’endroit a été paré de nouveaux atours à la faveur de la vague d’œnotourisme de luxe qui gagne la Bourgogne depuis l’inscription de ses climats au patrimoine mondial et les ouvertures de la cité de la Gastronomie (Dijon) et des cités des Climats (à Dijon, Beaune et Chablis), sans oublier les beaux hôtels. Cette folie qui fut parfois appelée chalet et même châtelet de Vougeot se distingue d’emblée par son architecture, ni Belle Époque, ni Art nouveau, ni régionale. Elle est curieusement flanquée d’une tour, « d’où l’on peut voir toute la côte de Nuits et la côte de Beaune, Les Echézeaux, Musigny, le Clos et même le Mont-Blanc par temps clair », s’enthousiasme Frédéric Drouhin. Bref, elle est résolument unique en Bourgogne.
C’est le négociant Paul Martini-Rosé, acquérant des parcelles du clos de Vougeot en 1890, qui la fit construire. On ne connaît ni la date exacte, c’était entre 1891 et 1901, ni l’architecte. Lovée au sein du plus grand clos viticole de Bourgogne, offrant des vues spectaculaires, disposant d’entrées séparées pour le personnel et les invités, elle garantissait à ces derniers « une intimité discrète sans que personne ne puisse savoir qui se trouvait réellement là ». Ou ce qui s’y passait. Frédéric Drouhin a mandaté un historien pour lever le voile sur son histoire. Pas trop cependant. Il faut, dit-il, « comme pour nos vins, garder une part de mystère ». Celui qui a grandi et qui travaille dans des lieux historiques (la maison Joseph Drouhin est assise sur les caves du parlement des Ducs de Bourgogne, à Beaune, et a acquis notamment un joyau architectural en Saône-et-Loire, le château de Chasselas, l’an dernier, NDLR) dit aimer les vieilles pierres. « Je suis depuis toujours sensibilisé au patrimoine, je voyage beaucoup et immanquablement lorsque je rentre, je m’émerveille encore de toutes les beautés de la Bourgogne », confie-t-il. C’est toujours une expérience rare que de pouvoir déguster, déjeuner, dîner au cœur d’un grand cru. À La Folie de Vougeot, les vins proposés sont issus d’une cave aux références prestigieuses en partie alimentée par la maison Drouhin et le domaine de Montille. Les clients pourront également apporter leurs flacons préférés. Les passionnés pourront consulter la plus grande collection privée de livres et de littérature sur le vin et la gastronomie de Bourgogne et, privilège des privilèges, passer une nuit à la folie. En Bourgogne, dormir au sein d’un grand cru est encore inédit. Il faudra montrer patte blanche et un portefeuille bien garni.

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